• <o:p> </o:p>

    <o:p> </o:p>

    Devoir maison.<o:p></o:p>

    F5072 l’Histoire de l’orthographe et des graphies.<o:p></o:p>

    Gabriella Parussa.<o:p></o:p>

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    Consigne :<o:p></o:p>

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    Présentez une analyse des graphies du 15ème siècle, d’après un texte court en vers, ainsi qu’une comparaison entre l’orthographe de deux copies différente de ce même texte.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    Voici une petite présentation du texte que vous devez analyser :
    Il s'agit du Dit de Poissy, de Christine de Pizan, composé probablement peu après avril 1400. <o:p></o:p>

    Ce texte nous est parvenu dans de nombreux manuscrits, mais vous avez à votre disposition deux exemples : le manuscrit de la Bibliothèque nationale de France fr. 835 (composé du vivant de l'auteure, à Paris) et le manuscrit conservé à la British Library, ms. Harley 4431, (composé vers 1414, aussi du vivant de Christine, toujours dans un atelier parisien).

    Les deux photos que je vous envoie, en pièces jointes cf. annexes), reproduisent l'une l'enluminure qui précède le texte et l'autre une page du manuscrit Harley, c'est juste pour que vous puissiez vous familiariser avec l'écriture de cette époque et admirer l'enluminure. Le texte a déjà été transcrit par moi sur les feuilles que je vous ai distribuées.

    J'attends une présentation écrite (peut-être aussi orale) de quelques pages sur les graphies au XVe siècle, d'abord dans chaque manuscrit, ensuite sur la comparaison des deux systèmes graphiques qui sont contemporains. Vous pouvez aussi, éventuellement, comparer avec l'orthographe moderne.<o:p></o:p>

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    Introduction : <o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

     Ces deux textes présentent à la fois de nombreuses ressemblances et de nombreuses différences. <o:p></o:p>

    Nous commencerons donc par étudier les spécificités du premier texte, celui de la BnF, puis nous étudierons les spécificités du second, celui de la British Library. <o:p></o:p>

    Ensuite, nous ferons une comparaison entre les deux textes puis une comparaison entre les graphies du XVème et les graphies modernes. <o:p></o:p>

    En annexe, j’ai mis un alphabet API qui m’a servit de modèle, les deux retranscriptions, et les images du manuscrit original de Harley.<o:p></o:p>

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    I) Présentation des graphies du XVème siècle sur le manuscrit de Paris, BnF fr. 835. <o:p></o:p>

    (On parlera du manuscrit ou du copiste 1)<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • Lors d’une première observation du manuscrit, on remarque que le copiste n’utilise presque aucune ponctuation. Il n’y a pas de point, ni de virgule, ni de guillemets, ni de points d’exclamations ou d’interrogations. Cependant, il met une majuscule au début de chaque vers. <o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    •  On peut remarquer que dans ce manuscrit, le copiste n’utilise que très rarement les accents. Sur cent vers, on n’en relève seulement deux : un au vers 49 « La n’auoit dit ne sonné mot cuisant » ; puis au vers 89 « Des oysilons qui de uoix très serie ». On remarque tout de même que les deux accents sont différents : on a un accent grave et un accent aigu. Le copiste les utilisait donc pour marquer deux sons différents. <o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • Cependant, on voit qu’il utilise régulièrement les trémas : au vers 20 « abbaïe » ; au vers 54 « S’esiouïssoit », au vers 55 « resiouïssoit » ; et au vers 97 « La peüst en oïr maintes lecçons ».<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • On note que le copiste n’utile jamais la lettre –v mais uniquement la lettre –u, comme par exemple dans le vers 1 « uous » pour vous ; le vers 17 « saouir » pour savoir ; le vers 92 « nouuelles » pour nouvelles.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • On note aussi l’absence totale du –j, remplacer par le –i comme on le voit dans le vers 31 « iolys escuier » pour joli ; ou dans le vers 36 « et moult ioyeuse estoit » pour joyeuse.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • Le –lz remplace régulièrement notre –s ou-x actuel : au vers 1 « sire doulz », au vers 15 « D’aller iouer si uoulz aller ueoir », au vers 53 « retentissoit et ainsi qui mieulx mieulz ». On voit dans ce dernier exemple qu’on a même parfois la graphie –lx. <o:p></o:p>

                On peut supposer que c’était la marque du pluriel en usage à cette époque. <o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • On note une hésitation sur la graphie du son [wa] : en effet les vers 10, 11, 12 et 13 se terminent respectivement par les termes « moys », « bois », « ainçois » et « fois ». On peut donc supposer que le premier terme se prononçait comme les trois suivant, afin de respecter la rime, malgré une graphie différente, c’est-à-dire [wa].<o:p></o:p>

    Les vers riment par quatrains. De cette constatation, on peut donc aussi noter : les vers 34, 35, 36 et 37 doivent se prononcer de la même manière que les vers cités précédemment : « ioye », « uoye », « estoie », et « menoie ».<o:p></o:p>

    Ainsi la graphie du son [wa] peut se faire de deux façons : -oi ou –oy.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • On note une hésitation sur la transcription des sons [œ] et [u] :<o:p></o:p>

    Le son [œ] a la graphie –eu dans le terme « mieult » (vers 53) ; <o:p></o:p>

    Le son [u] a la graphie qu’on lui connait –ou de nombreuses fois : vers 35 « Nous », vers 40 « Doulces », etc. <o:p></o:p>

    Mais dans le terme « cuers » le son [œ] a la graphie –ue.<o:p></o:p>

    Et enfin dans les vers 73 et 75, où l’on peut lire alternativement « Fleurs » et « flours ».  Au vers 79, on a de nouveau « flour ». <o:p></o:p>

    Donc le son [œ] peut se noter –eu ou –ou tout en sachant que le son [u] s’écrit aussi –ou.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • On remarque aussi que le copiste utilise différentes graphies pour le pronom personnel on : au vers 72 on peut lire « qu’on sieult » alors qu’au vers 97 on peut lire « La peüst en oïr ». <o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    <o:p> </o:p>

    II) Présentation des graphies du XVème siècle sur le manuscrit de Londres, la British Library, ms. Harley 4431 (On parlera du manuscrit ou du copiste 2)<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • On ne note toujours aucune ponctuation, mis à part les majuscule au début de chaque vers.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • Contrairement au manuscrit 1, le copiste utilise régulièrement les accents : on en trouve notamment dans le vers 7 « Là où ce fu… », le vers 16 « que i’ay à dire uoir » et le vers 82 « Font chappellés ».  <o:p></o:p>

    On note que l’accent marque la différence entre par exemple le déterminant défini féminin la (cf. le vers 87 où on lit « Ainsi adont fu la terre flourie ») et l’adverbe de lieu .<o:p></o:p>

    Ce copiste aussi marque une différence entre les accents graves et les accents aigus.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • On note une récurrence de la graphie –y pour marquer le son [i], mais pas de manière systématique.<o:p></o:p>

    On lit par exemple dans le vers 1 « sire », le vers 66 « Qui resplandir », le vers 52 « Si halt si bien que souuent tous li lieux », etc.<o:p></o:p>

    Mais on voit aussi le vers 81 « amye » (qui doit rimer avec les vers précédents « mie » et « blesmie ») et dans le vers 95 « par my ».<o:p></o:p>

    Dans les deux cas, on note le son [i].<o:p></o:p>

    On remarque pourtant que le plus souvent, le –y sert dans la transcription des sons complexes tels que :<o:p></o:p>

     [e] dans le vers 27 « apprestay » et le vers 46 « taysant ».<o:p></o:p>

     [j] dans le vers 30 « delayer », le vers 31 « escuyer » et le vers 32 « conuoyer ».<o:p></o:p>

    [wa] dans le vers 55 « soy » et le vers 96 « oysillins ».<o:p></o:p>

    Ou bien encore la même lettre permet de transcrire deux sons différents dans le même mot : ainsi on a dans le vers 20 « abbaye » où le –y fait d’abord le son [e] puis [i] : [a-b-e-i] ; et dans le vers 21 « royal » où le –y fait d’abord le son [wa] puis [j] : [rwa-ja-l].<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • Comme dans le manuscrit 1, il n’y a pas de lettre –j ni de –v. ces lettres sont respectivement remplacer par les lettres –i et –u. On voit ainsi la présence encore forte du latin dans l’écriture française. <o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • Pourtant, il utilise déjà la graphie –ch pour le son [ ᶴ ], alors que ce son n’existe pas chez les latins.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • On remarque une hésitation sur l’utilisation du –h muet : aux vers 58 et 67, il écrit « erbe » alors que dans le vers 75, il écrit « Herbes ».<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • Par comparaison avec le manuscrit 1, on note que le second copiste n’utilise pas les trémas au même endroit que le premier copiste, il a tendance à les supprimer, on n’en retrouve qu’au vers 54 « S’esiouïssoit » et au vers 55 « resiouïssoit ».                                                                                          Il les supprime dans le vers 20 : « abbaïe » devient chez lui« abbaye » ;                                             Dans le vers 97, on passe de « La peüst en oïr maintes lecçons » à « Là pouist on ouyr maintes      leçons ». Il change le son dans la deuxième version : on passe de [pœ-u-st] à [pu-i-st].<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • On peut aussi souligner une hésitation dans la marque du pluriel : <o:p></o:p>

    Parfois, il utilise un –s comme dans le français moderne : dans le vers 40 « Doulces plaisans gracieuses et belles », dans le vers 75 « herbes » ou dans le vers 77 « iaunes ».   <o:p></o:p>

    Soit il utilise un –z, là où le français moderne utilise maintenant un –s : dans le vers 39 « gentilz », dans le vers 75 « qu’ilz » ou dans le vers 98 « rossignolz ».<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    <o:p> </o:p>

    III) comparaison des deux systèmes graphiques dans la version contemporains.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    On remarque que le deuxième texte comporte quelques différences au niveau des termes utilisés.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • Au vers 10, on peut voir que le copiste à supprimer un mot : « D’auril l gay ou recuerdissent bois » devient « D’auril le gay ou Ø bois ». Bien sûr, il ne faut pas perdre de vue que le second copiste avait peut-être un modèle abîmer et que le mot était illisible. <o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • Le copiste fait aussi des remplacements, il utilise un mot pour un autre : au vers 62 « Mais en l’anée » devient « Ne en l’année » ; au vers 67, on lit que « Fist l’erbe uert pour les cuers esbaudir » qui devient « Fist l’erbe uert pour tous cuers esbaudir » ; le vers 93 « chantant de uoix » devient « chantans à uoix » et enfin le vers 95 « sur les arbres » devient « sur ces arbres ». A chaque fois, c’est un choix conscient, pusique les mots ne ressemblent ni dans la graphie, ni dans la prononciation, sauf pour notre dernier exemple. Là encore, on peut supposer que c’est dû à une difficulté de déchiffrage. <o:p></o:p>

         <o:p></o:p>

    • Le second copiste opère aussi des inversions : dans le vers 51, on peut alternativement lire « Si y chantoit qui sauoit chanter mieulx » et « Si y chantoit qui chanter sauoit mieulx ». Il est intéressant de remarquer qu’en français moderne, on utiliserait spontanément un troisième ordre possible : « celui qui savait le mieux chanter »<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • Comme on l’a déjà fait remarquer, le second copiste utilise beaucoup plus le –y.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    ·         On note que chez le copiste 1, on peut trouver la graphie –es à la fin de certains termes, comme par exemple dans le vers 1 « uueilliez » ; le vers 6 « orrez » ; le vers 71 « prez » ou le vers 82 « chappellez ». Or dans la version du second copiste, on trouvera respectivement : « Uueillies » « orrés », « pres » et « cheppellés ».<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • On peut aussi lire une différence récurrente sur l’utilisation des graphies –o et –ou.<o:p></o:p>

    Au vers 60, on a ainsi : « floretes » et « flourettes » ; au vers 61 « soleil et « souleil » ; au vers 97 « oïr » et « ouyr ».<o:p></o:p>

    On peut supposer qu’il y avait une différence de prononciation entre les deux copistes, le second utilisant plus fréquemment le son [u]. <o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    <o:p> </o:p>

    • On remarque que le second copiste coupe certains termes : au vers 73 on a « fleurs de printemps partout uest on germer » qui devient : « flour de prin temps par tout uest on germer » ; et au vers 95 « et parmi ces buissons » devient « et par my ces buissons».<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • Le premier copiste écrit systématiquement les chiffres en toutes lettres : « ne mille ne cent » au vers 8, « mil quatre cent » au vers 12 et « six » au vers 23. L’autre utilise parfois les chiffres romains : au vers 12 « an mil. .cccc. ; » et au vers 23 « .vj. » qui correspond à VI, c’est-à-dire 6. Cependant au vers 8 il écrit lui aussi « ne mille ne cent ».<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • Enfin on rencontre un problème important avec l’auxiliaire avoir au présent de la troisième personne du singulier : « a ».<o:p></o:p>

    Dans les deux textes, on lit au vers 65 « le ciel ot donnée » et au vers 71 « nature ot fait semer ». L’auxiliaire semble être remplacé par le mot « ot ». <o:p></o:p>

    De plus, dans le manuscrit 1 le copiste omet de mettre un accent sur le « a » alors que ce n’est pas l’auxiliaire avoir : au vers 75 « qui a la terre » alors que le second copiste, lui, met l’accent : « qui à la terre ».<o:p></o:p>

    Or au vers 94, les deux copistes omettent l’accent, alors que le français moderne en aurait mit un : « et a haulx sons ».<o:p></o:p>

    Et dans le manuscrit 2, on note le rajout d’un accent sur le verbe avoir vers 34 « Lors à grant ioye » alors que le manuscrit 1 n’en met toujours pas « Lors a grant ioye ».<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    <o:p> </o:p>

    IV) comparaison avec l’orthographe moderne. <o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    On note que c’est dans le second manuscrit qu’on retrouve le plus de mots orthographiés de la même façon qu’aujourd’hui. Pourtant, les deux textes ont été copié quasiment à la même époque. <o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • Au vers 20, on relève le terme « abbaïe » ou « abbaye ». On remarque que de nos jours, on prononce le son [i] et non le son [j], c’est-à-dire qu’on l’écrit comme dans le manuscrit 2 mais qu’on le prononce comme il est transcrit dans le manuscrit 1. Cependant, on peut supposer que le second copiste le prononçait, lui aussi, [abei] et non pas [abej]. <o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • Au vers 57, on lit dans le premier manuscrit « soleil » et dans le second « souleil ». Un choix a donc été fait sur la prononciation et sur la graphie de ce mot. <o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • Le vers 62 passe de « Mais en l’anée » à « Ne en l’année ». Nous retiendrons cette seconde orthographe. <o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • Au vers 23, on peut remarquer que certains mots n’ont pas encore d’accent, comme par exemple le mot « eglise », contrairement au français moderne.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • La comparaison des deux textes permet aussi de faire des suppositions sur la prononciation : on note un changement entre : « oissillons » et « oysillons » au vers 96 (ou bien est-ce un changement topique ?). <o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • Il est aussi intéressant de s’arrêter sur les vers 23 et 26 où dans les deux cas on lit : « celle eglise » et « celle terre ». En français moderne, on aurait utilisé le terme « cette ». la similitude entre les lettres –t et –l permet de faire différentes suppositions : <o:p></o:p>

    Soit à cette époque, les deux étaient difficiles à différencier, et les deux auteurs ont mal copié. <o:p></o:p>

    Soit on utilisait au choix l’une ou l’autre graphie. Cependant on ne remarque ce changement que deux fois, ce qui montre tout de même que le choix devait être limité. <o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    • On peut mettre en évidence un changement dans une expression encore utilisé de nos jours :<o:p></o:p>

    Ils écrivent au vers 53 « ainsi qui mieulx mieulx » alors qu’aujourd’hui, il faut mettre « à qui mieux mieux ». <o:p></o:p>


    votre commentaire
  • Un amour de Terrine<o:p></o:p>

    Par Claire Delhomme.<o:p></o:p>

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    « Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,
    Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m'attends.
    J'irai par la forêt, j'irai par la montagne.
    Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps. »

                                                             Victor Hugo<o:p></o:p>

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    Chapitre 1

    <o:p> </o:p>

      Viens, tu verras, ça sera génial!

    Voici les termes exact que mes amis ont utilisé pour me convaincre de venir passer deux semaines dans une grande maison, à la campagne. Et j’ai craquer. J’ai accepter.

    Maintenant je suis assise dans le train et je reste septique. Vous verrez que ce n’était pas à tord. Déjà, l’idée de louer une maison au milieu des champs, même avec des amis, ça ne m’emballe pas trop. Je ne sais pas pour vous, mais moi, au bout de deux jours de verdure à perte de vue, j’ai tendance à faire des overdoses de chlorophylle.

    Jusque là, c’est vrai, ça allait à peu près. J’étais assise dans le TGV et sur le point d’arriver à Bourg-en –Bresse, où mes chers amis devaient venir me chercher.

    Puis  mon téléphone s’est mit à sonner et là mon Fear Factor personnel a commencé. D’après ce qu’ils tentent de m’expliquer au bout de la ligne, il y aurait un tout petit changement programme qui fait que je serais seule quelques jours, oh, vraiment pas longtemps. J’écoute à peine leurs explications et leurs excuses. La seule chose que je comprends dans leur charabia c’est que je vais devoir passer les premiers jours de ces vacances si prometteuses abandonnée dans un village perdu dans le néant campagnard, en plein mois d’août. C’est étrange, j’ai l’impression d’être dans un mauvais rêve. Leurs paroles m’arrivent comme à travers un brouillard cotonneux. Ce ne sera peut être que quelques jours mais j’ai déjà l’impression de démarrer un voyage de l’extrême et ma tête tourne. En plus, la climatisation du train est en panne depuis deux heures alors qu’il doit faire 72°c à l’ombre. Depuis Paris, j’en suis déjà à ma quatrième mini bouteille d’Evian, le môme insupportable assis à côté de moi commence à sentir dangereusement des pieds et je crois que mon mascara non water proof coule.

     « Génial » n’est peut-être pas exactement le qualificatif que qu’il faut utiliser…

    <o:p> </o:p>

     Bien sûr, quand j’arrive à la gare, je ne trouve pas de taxi. Après avoir erré avec mon immense valise, mon sac à dos et mon sac à main top tendance mais énorme, j’atterri dans un café. Le patron est sympa avec moi et après avoir discuter un peu avec lui,  une solution semble se présenter. La façon la plus simple pour rejoindre le village d’indien où m’attend la location - à soixante petits kilomètres d’ici - c’est d’attendre le lendemain matin et de partir avec la boulangère, parce que le taxi est parti en vacances.  Mais non, ça la dérangera pas, c’est une amie à lui, et elle adore discuter alors ça lui fera plaisir d’avoir un peu de compagnie.

    De toute façon, vu les circonstances, je n’ai pas trop le choix.

    <o:p> </o:p>

     Le lendemain, après avoir passer une nuit dans un vieil hôtel, tenu par un vieux monsieur, j’embarque à bord d’une vieille camionnette – à croire qu’ils ont rien de neuf  ici- avec la vieille boulangère. Elle est plutôt gentille, le problème c’est qu’effectivement elle aime parler. Beaucoup. Trop. Et en plus, il y a un petit détail que je n’avais pas capté : ce n’est pas elle qui m’accompagne au village, c’est moi qui l’accompagne dans sa tournée ! Donc au lieu de mettre une demi heure, il nous faut trois heures de route, le temps de passer par tous les hameaux de la régions. Comme c’est une femme très serviable, elle a l’extrême amabilité de me faire l’historique de chaque clocher, de me retracer la généalogie de chaque famille et de me raconter les rumeurs de chaque coin de rue. J’adore les potins, mais savoir que Madame Simone avait déchiré une carte postale le mois dernier après avoir foutu une claque à Marcel, soit disant parce que son tracteur avait écrasé des géraniums, très honnêtement, je n’arrive pas à m’intéresser, oui, même en faisait un gros effort. Enfin bon, au bout de trois heures qui en valent mille, et où j’ai vaillamment résisté à l’envie  d’arracher le pare soleil pour assommer mon chauffeur bavard, j’arrive sur la place de Poncin.

    <o:p> </o:p>

     Ô joie, Ô bonheur. Me voilà tel Ulysse ayant enfin atteint les rivages d’Ithaque. Soulagée d’être enfin arriver, je remercie tout de même chaleureusement Martine. Mais mon bonheur est hélas de courte durée. Je regarde lentement autour de moi. Où suis-je encore tombée ? Qu’ai-je fais pour mériter ça ? Moi qui ai du mal à survivre loin du métro, de la place Soufflot et du jardin des plantes ?? C’est une mauvaise blague ou une caméra cachée, mais je refuse de croire que l’endroit « trop coooool » choisi par mes potes soit ce village de quatre-vingts seize habitants dont soixante-treize sont sûrement du troisième âge !

    Maintenant j’en suis tout à fait certaine : je vais mourir.

    En plus, si ça se trouve, se ne sont même pas des vieux mais des extraterrestres déguisés en humain, comme dans Men in Black, parce que franchement, quel humain voudrait s’exiler dans un trou pareil ? Ils vont prendre le contrôle de mon cerveau et m’obligé à labourer les champs avec mes super sandales qui seront ravagés par la terre. Puis ils me feront couper du bois pour l’hiver jusqu'à ce que mes mains aient des rides et des ampoules !

    <o:p> </o:p>

     Bon, comme je suis super courageuse, je soulève quand même mes bagages et je prends la première - et unique -  rue afin de trouver mon gîte. L’avantage, c’est que je risque pas de me tromper, il n’y en a qu’une seule avec l’affreux macaron « gîtes de France » et vu la taille du village, je ne risque pas de me perdre.

    Sauf que je n’étais pas censé être la première ici. Donc je n’ai pas les clés…

    Là, nouvelle angoisse. Il me faut bien dix minutes pour trouver un endroit où mon portable capte afin d’appeler mes amis pour avoir le numéro ou l’adresse du propriétaire. Ces dix minutes sont très significatives à mes yeux : je vais passer quelques jours seule au monde, dans un endroit où je n’aurais pas constamment cinq barrettes de réseau ! Je commence à avoir des sueurs froides. Respirer profondément, calmement. Je peux le faire.  Je finis par obtenir une tonalité et à établir une communication en me tenant debout sur un petit muret en ciment et en me penchant un peu.  Ouf.

    <o:p> </o:p>

    Une fois prévenu, le propriétaire ne met que quelques minutes à venir puisqu’il habite aussi dans le village. C’est un vieux monsieur (encore !), assez gentil, qui a un talent remarquable. En moins de trois minutes montre en main il arrive à me raconter une grande partie de sa vie marital, le caractère difficile de sa femme et à me demander d’arroser sa plante verte. Il parait que sa femme fait une allergie mais lui, il ne peut pas s’en passer, il l’adore, sa petite plante. Du coup il la mise dans la maison, et il vient tous les deux jours pour s’occuper d’elle. Il m’a dit le nom exact en français et en latin mais je l’ai instantanément oublié.  Ne voyant pas trop comment refuser ni comment lui expliquer que je n’ai absolument pas la main verte, j’accepte du bout des lèvres.

     Puis je découvre avec quelques appréhensions l’intérieur de la maison. Tout d’abord la cuisine. Immédiatement je me sens mieux. Il y a un four micro-onde qui me permettra de ne pas mourir de faim. Comble du luxe, je découvre ensuite une machine à café. Ma survie sera peut-être, je dit bien peut-être, possible finalement…

    Comme il est déjà presque midi, je décide de continuer mon exploration après le déjeuner. Sauf que… le frigo est vide. Evidemment. Heureusement, face aux grands problèmes, je n’ai jamais eu peur de prendre les grandes décisions nécessaires. Je décide donc immédiatement de planter un potager. D’un côté, je mettrais les légumes et de l’autre, des herbes aromatiques en tout genre. Et je construirai une petite fontaine en marbre blanc. Et je pourrai élever quelques poules et des lapins. Je construirai moi-même de beaux clapiers que je peindrai en rose et vert anis. J’ai vu ça dans déco, c’est top tendance pour les chambres. Et je ne vois pas pourquoi les lapins n’auraient pas le droit d’avoir de beaux murs. Et je ferais des tartes aux myrtilles. Ou une tarte au citron. Bien sûr il faut d’abord que je plante les arbres, mais ça je demanderai à ma maman, elle s’y connaît bien en plantation. Et je ferai des gratins aux légumes du jardins. Et je …

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    J’avoue, en fait, j’ai juste fini de manger le paquet de petits Lu que j’avais encore dans mon sac, un paquet entier de fraises tagadas – d’ailleurs ça écœure très vite  -  et un chewing-gum. Le tout arroser d’un grand verre d’eau. Les poules, les arbres et la tarte attendront…

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    Voilà, ça c’est fait… Maintenant grande question : comment vais-je occuper mon après-midi moi ? Ici, sans voiture, sans réseau, sans ordinateur, sans personne ? Pour ne pas tourner en rond, je prends ma valise et je commence à explorer mon nouvel intérieur. On appelle ça la « familiarisation avec le milieu hostile ». En premier, le salon. Rien de très intéressant, sauf un lecteur DVD. Mais je n’ai pas pris de DVD avec moi, évidemment. Je découvre aussi la plante dont je dois m’occuper. Elle trône, immense, dans un pot en plein milieu de la table de basse. Personnellement, je lui trouve rien de particulier, mais la botanique, ça n’a jamais été mon fort. En plus, je trouve qu’elle gêne sur la table. Je la soulève avec difficulté – elle pèse une tonne cinq au moins ! – et la pose dans un coin de la salle. Puis je découvre les toilettes. Il y a un petit cadre représentant une Sainte. Etrange idée que de l’accrocher là, non ? Mais bon, je ne veux pas juger. A l’étage, quatre chambres et deux salles de bain. Je prends tout mon temps pour choisir la plus belle pièce, les premiers arrivés sont les premiers servit, et toc ! Je m’installe tranquillement dans une belle pièce lumineuse avec de jolis rideaux écrus. Le lit grince un peu mais de toute façon, tous les lits où j’ai dormi, à la campagne, grinçaient. Je vide ma valise, je retouche mon gloss., je revérifie pour la cinquième fois l’absence de message sur mon répondeur… Il doit au moins être 14h là.

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    Je vérifie avec espoir à mon poignet. 12h15. Et là, tout à coup, je ressens comme une vague de panique. A la campagne, le temps s’arrête. Je vérifie ce phénomène depuis que je suis toute petite. A chaque fois c’est pareil. Il suffit que je m’éloigne un peu des relais téléphone, qu’il y ait autour de moi trois champs ou plus et que je sois à moins  de deux cent mètre d’une vrai vache et là ça ne loupe jamais. Le temps s’arrête, l’air semble immobile et j’entends mon propre souffle. Je suis comme perdu dans le vide galactique. L’angoisse totale. J’ai du mal à respirer. J’ai besoin du contact de la civilisation. Rapidement ! Tout de suite !

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    Chapitre 2<o:p></o:p>

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    C’est ainsi, avec la ferme attention de pactiser avec les peuplades de ces terres reculées, que je quitte la maison. J’adore les gâteaux secs, mais de la à ne manger que ça pendant trois jours, il y a tout un monde.

    Je sors dans la rue et me dirige lentement vers la place centrale. L’ambiance est menaçante. Il fait très chaud. Tout est silencieux. Le village semble désert. On se croirait dans un mauvais Western, surtout quand je vois une poule traverser la rue en picotant. Je pourrai croiser John Wayne que ça ne m’étonnerai qu’à moitié. J’essaye de me concentrer sur mon objectif : trouver de quoi remplir mon frigo. Je me laisse guider par l’odeur alléchante d’un poulet rôti. Cette solution est mille fois plus simple que de courir moi-même après une volaille qui refuse de ce laisser attraper.

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    C’est ainsi que j'ai atterrie dans cette petite boucherie local. Tant mieux pour moi, cette boutique semble être le point de ralliement du village, là où tout se passe, là où ça bouge ! C'est-à-dire qu’au moment où j’arrive, il y a trois vieilles dames et le boucher qui discutent avec animation. Autant dire qu’il y a foule !<o:p></o:p>

     La première des vieille est assise sur une chaise, son caddie rose fluo coller à elle. La seconde tiens dans ses bras un genre de caniche affreux blanc sale qui aboie aigu. Je déteste les chiens et encore plus les caniches qui aboient aigu. La troisième, superbe dans sa jolie blouse fleurie, très estivale, bouge avec conviction les bras dans tous les sens pour appuyer ses propos. Mais au moment où j’entre, j’assiste à un magnifique arrêt sur image grandeur nature. C’est impressionnant. En une fraction de seconde, les trois arrêtent leurs bavardages, se tournent vers moi et me passent au scanner intégral. C’est encore pire que lors d’un entretient d’embauche ! Faut dire que je ne dois pas avoir le look couleurs locales avec mes sandales compensées, mon sac à main top tendance et ma manucure nickel. Heureusement qu’elles ne savent pas que j’ai mon pass navigo dans une poche et un téléphone portable dernière génération dans l’autre. Puis, brusquement, comme si je n’avais jamais fais irruption dans leur monde, elles repartent de plus belles dans la critique gastronomique du dernier déjeuner de famille donner par la voisine, Madame Jeannine semble-t-il. Résignée à mourir d’ennuie debout en attendant mon tour, je passe en revue la boutique du regard. Elle a tous les détails du commerce de proximité villageois. A gauche de la porte, un grand bac remplie de paquets de chips en tout genre. Personnellement, je déteste ceux avec les goûts chimiques et bizarres genre « barbecue » ou « bolognaise » et pire encore : « oignon ». J’ai toujours eu un problème avec les produits « goût oignon ». Une fois, lors d’un voyage scolaire en Angleterre, alors que j’avais vraiment faim, une fille m’a proposer un muffins que sa famille d’accueil lui avait donné. A l’oignon. Sauf que je ne le savais pas. Et les muffins aux oignons, ce n’est pas bon du tout. Une autre fois, sur un marché de Noël de dégustation, j’avais pris une grande cuillère de confiture à la poire pour goûter. Et surprise ! Je n’avais pas pioché dans le bon pot et j’ai avalé une grande bouché de confiture à l’oignon. Et la confiture à l’oignon, quand on attend de la poire, ce n’est pas bon du tout non plus… Mais je m’égare là. Je pioche rapidement un paquet nature et je continue mon observation. Sur le même mur, il y avait des étagères avec des paquets de pâtes et des conserves en tout genre. Boucherie-épicerie, le grand luxe quoi... Le côté droit était occupé par la vitrine. J’ai toujours trouvé ça un peu écoeurant : les salades composés qui ne ressembles à rien, les pâtés en croûte, toutes ces… choses qui flottent dans de la gélatine brunâtre, et ces tranches de viandes sanguinolentes. Le pire dans tout ça, se sont les cervelles et les langues. Brrr… rien que d’y penser ça me donne la chair de poule. Je relève donc assez rapidement les yeux. Comme dans presque toutes les boucheries du pays, il y a un poster au mur avec un cochon rose en costume bleu et un chapeau à rayure, qui rigole. Je ne comprend pas. Pourquoi ont-ils tous cet affreux poster ? C’est un cadeau offert pour « toute boucherie ouverte » ? Et bien sûr, sur le comptoir, il y un autre petit cochon, en céramique celui là et avec une fente sur le dos. Il y a-t-il vraiment des gens qui donne un pourboire à leur boucher ?? Je trouve l’idée étrange, après tout on n’en donne pas dans les grands magasins, ou quand on achète un tee-shirt…<o:p></o:p>

     L’attente s’éternise, c’est-à-dire que j’attends bientôt depuis plus de cinq minutes, ce qui est intenable pour quelqu’un qui comme moi, viens d’une ville où quand on marche au lieu de courir c’est qu’on est perdu ou touriste. Je tente alors de m’intéresser discrètement à la conversation.<o:p></o:p>

      « Parait que le p’tit de <st1:PersonName productid="la Jeanne" w:st="on">la Jeanne</st1:PersonName>, c’est le portrait craché de son père… c’est pas facile de commencer dans la vie avec un tel handicap…<o:p></o:p>

      - C’est surtout triste pour la mère ! Si au moins il avait eu ses yeux, mais non ! En plus il parait qu’il suit les traces non recommandables de son frère…<o:p></o:p>

      - C’est comme Luc, le fils de Madame Bourdin, hier il a été pris dans le jardin du vieux Maurice, en train de voler des framboises ! Il parait que… »<o:p></o:p>

    L’anecdote est amusante mais je me lasse rapidement. Le boucher le remarque, ainsi que mon exaspération grandissante. Ok, c’est parce que je pianote des doigts sur le bord de la vitrine en soufflant un peu et en regardant en l’air depuis cinq minutes. Mais bon, je n’allais quand même pas rester ici, à attendre que les trois vieilles passent en revue toute la population du village, leurs descendances et les voisins des petits enfants ! Même si c’est drôle à écouter quelques instants. <o:p></o:p>

     «  Alors mademoiselle, qu’est ce qu’il vous faut ? <o:p></o:p>

    Heureuse que ça soit enfin mon tour, je réponds en souriant.<o:p></o:p>

      - Un poulet rôti s’il vous plait.<o:p></o:p>

      - Avec ou sans patates ? <o:p></o:p>

      -  Sans, merci.<o:p></o:p>

      - Je suis désolé, elles ne veulent pas partir…dit-il en agitant le sachet en papier.<o:p></o:p>

      - Pardon ??<o:p></o:p>

      - Les patates, elles ne veulent pas partir du sachet… »<o:p></o:p>

    Avec un grand sourire, il secoue de nouveau le sac sur lequel est représenté une petite poule brune entourée de pommes de terre de jaunes, sur un fond de campagne. Je comprends la blague, il parle du dessin. C’est misérable. Mais au moins, maintenant je sais pourquoi il y a foule dans sa boutique : c’est LE rigolo du village, celui qui y met de l’animation, qui le fait vivre ! Je tente un pauvre sourire mais je ne pense pas que soit très convainquant. La blague n’est vraiment pas assez drôle. Je dois vraiment faire une tête bizarre, parce qu’il rajoute : <o:p></o:p>

      «  N’attristez pas votre front gracieux, ce n’est qu’une blague, continuez à sourire, c’est si joli.  Et il me fait un petit clin d’œil en emballant mon futur dîner. Là, je suis étonnée. Je dois faire erreur, ce n’est pas possible. Non, sérieusement ?

      - Désolée, je dois rêver debout, mais merci, c’est gentil à vous…

      - Riez pourtant ! <o:p></o:p>

      - Du sort ignorez la puissance… »

    C’est à son tour de faire un grand sourire. Je ne rêvais donc pas. Il est en train de me citer A une jeune fille de Victor Hugo. Je décide de le tester encore un peu, on ne sait jamais. Je lance au hasard :

    «  Maintenant que Paris, ses pavés et ses marbres …

      - Et sa brume et ses toits sont bien loin de mes yeux ;<o:p></o:p>
      Maintenant que je suis sous les branches des arbres…<o:p></o:p>
      Et que je puis songer à la beauté des cieux … »<o:p></o:p>
     A Villequier. Comme ça, sans hésiter, il complète les vers d’un poème inconnu pour la plupart des littéraires que je fréquente habituellement. J’en reste bouche bée. Il a fallu que ça tombe sur un boucher perdu au fin fond de la campagne. J’ai tellement du mal à y croire que je tente un dernier vers.<o:p></o:p>
     «  Le rêve et la brume… 

      -Vont où va la nuit ;

      Paupières et roses

      S'ouvrent demi-closes ;

      Du réveil des choses

      On entend le bruit. »
    <o:p></o:p>
      L’aurore s’allume. Sans faute, sans oublier un mot, il récite la fin de la strophe. Cet instant est magique. Pour la première fois de ma vie, je rencontre un homme qui :<o:p></o:p>
    1)      sache du Victor Hugo par cœur.<o:p></o:p>
    2)      Ait moins de cinquante ans et ne sois pas à moitié chauve.<o:p></o:p>
    3)      Ait un plan B dans la vie autre que chanteur, poète ou clochard-bôhème. <o:p></o:p>
    <o:p> </o:p>
     Lui aussi à l’air content. Les trois vieilles, elles, sont muettes. On dirait trois statuts mais je suis certaine qu’elles ne perdent pas un mot de la conversation. Je soit sûrement être en train de leur donner matière à causer pour les vingt prochains hivers. Il me tend le poulet et les chips. Je paye et je m’apprête à quitter la boutique quand il me demande timidement :<o:p></o:p>
      - Mademoiselle, si je peux me permettre, si cela vous intéresse, il y a le serto à Nantua, demain matin, vous devriez venir…<o:p></o:p>
      - Le quoi ? <o:p></o:p>
     Devant mon ignorance, la vieille au caddie se met à pouffer. Je la calme immédiatement avec le regard-qui-tue-numéro-17. <o:p></o:p>
      - Le C-R-T-O. répète-t-il avec amabilité. Le Concours Régional de <st1:PersonName productid="la Terrine" w:st="on">la Terrine</st1:PersonName> d’Or.  En disant ça il rougit jusqu’à la racine des cheveux.<o:p></o:p>
      - Et bien, euh… pourquoi pas… <o:p></o:p>
    Pourquoi pas ? J’ai déjà une très bonne raison qui me vient instantanément à l’esprit : parce que je ne veux pas aller à une assemblée de rustres qui se réunissent pour manger du pâté en parlant cochon et volaille.<o:p></o:p>
      - Je ne sais pas, peut-être…<o:p></o:p>
      - Ça me ferai plaisir… <o:p></o:p>
    Il est tellemtent cramoisi que ça en devient touchant. <o:p></o:p>

      -  Je verrai… Au revoir Monsieur. »<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    Chapitre 3<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

     De retour à la maison, je repense à la scène. Victor Hugo par cœur quand même ! Où alors il n’en connaît que trois et il a eu beaucoup de chance. Mais les probabilités sont minces. En plus il était plutôt mignon dans son genre… mis à part le gros tatouage en forme de scorpion sur son bras droit et le petit en forme de triskèle celtique sur le poignet gauche. Je n’aime pas trop les tatouages, pour moi ça fait homme-qui-veut-faire-viril ou femme-qui-veut-faire-sexy alors qu’en fait, ça fait juste dessin-horrible-surtout-quand-on-vieilli. Mais bon, chacun ses lubies. Moi ça fait des années que je collectionne les dauphins en porcelaine pour les détruire, et personne ne comprend pourquoi…<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    J’étais en train de m’installer une chaise longue dans le petit jardinet derrière la maison, toute entière à mon analyse quand soudain la peur de ma vie ! Je me retrouve presque nez à nez avec une gigantesque vache ! Elle, pas un battement de cil, pas un poil qui bouge, elle me regardait tranquillement en mâchouillant un touffe d’herbe. Et en bavant un peu. Pour moi, les animaux, c’est encore pire que la campagne. Que ça soit un escargot mignon, un chien gentil, un bébé phoque trop chou ou une Montbéliarde énorme qui s’appelle Marguerite – ça je le sais parce que c’est écrit sur l’étiquette orange de son oreille – je flippe. <o:p></o:p>

    Je vais vous expliquer. Pour la plupart des humains il y a différentes catégories d’animaux: les insectes, les mammifères, les poissons, les reptiles, les oiseaux… bref tout est bien ordonné selon des tas de critères précis. Chez moi c’est beaucoup plus simple : il y a les animaux dangereux d’une part et les animaux très dangereux d’autre part. Ou alors quand je fais un effort, il peut y avoir : les animaux à éviter, les animmaux à éviter à tout prix, les animaux flippants et les animaux répugnants. Pourtant il faut faire attention. Même si je déteste toutes les bêtes, cela ne m’empêche pas d’être révoltée quand on les maltraite, d’être farouchement opposé au port de la fourrure et des bijoux en ivoire et de haïr les méchants qui font des marées noires qui tuent les oiseaux et les poissons. J’aime les animaux, mais de loin. <o:p></o:p>

    Donc je me retrouve nez à nez avec Marguerite. La situation est totalement ridicule. Elle porte un nom de jolie petite fleur des prés alors qu’elle fait au moins un mètre cinquante au garrot pour huit cent kilo de viande ! Elle s’est sûrement échapper du champ voisin pour venir brouter dans mon carré d’herbe. Et ce n’est pas moi, avec mes cinquante-cinq kilo tout mouillé, mon livre et ma chaise longue, qui vais la déplacer. Surtout que tout mon être refuse catégoriquement de s’approcher. Brusquement, toujours sans bouger, elle me lance un long meuuuuuuuuuh. Je fais un bond de cinq mètres en arrière tellement je sursaute fort. Je suis sûre qu’en plus, elle se moque de moi, on dirait vraiment la Vache qui Rit quand elle me regarde.<o:p></o:p>

    Puis, toujours tranquillement elle se met à avancer vers moi. Panique ! Elle se rapproche ! Alerte rouge ! Je me fais attaquer par un monstre à cornes ! Elle a une langue gigantesque qu’elle utilise pour nettoyer son  nez qui coule ! Beurk ! Au secours ! <o:p></o:p>

    N’écoutant que mon instinct de survie, je fais une prudente retraite dans la maison en priant très fort tous les dieux, même ceux de la mythologie grecque, de me sortir de ce mauvais pas. Je pense qu’ils m’ont entendu vu que la vache, après avoir distraitement fait un tour sur la terrasse en ciment, fait demi-tour. Je la suis du regard. Il y a dans le fond du jardin un trou dans la clôture, qui donne directement sur un troupeau. Je vais devoir vivre face à dix génisses plus grosse que ma voiture pendant deux semaines. C’est sûr, je vais mourir. Le milieu est bien trop hostile. En plus, il y a maintenant une énorme bousse à moins d’un mètre de ma chaise longue…<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

     J’appelle donc immédiatement le propriétaire de la maison - cool, je capte bien dans le jardin ! - pour lui expliquer mon problème d’invasion. Il a le culot de se marrer ! Il ne dois pas comprendre la détresse qui est mienne en cet instant. Savoir qu’a chaque instant mon espace vital peut être envahi par un représentant vivant de l’espèce animal est une angoisse que je ne peux pas supporter.  Au lieu de compatir, il me dit que ce trou existe depuis des années, que ce n’est pas grave, qu’en général les vaches ont la trouille et qu’elles ne devraient plus revenir maintenant qu’elles ont vu que la maison était de nouveau occupée. Mais ma voix commence à monter dangereusement dans les aigus. Je dois avoir l’air hystérique puisque au bout d’un moment il fini par accepter de venir régler mon problème de cohabitation. Je le remercie chaleureusement quand il me dit :<o:p></o:p>

     «  Bon et bien au revoir, je passerai demain.<o:p></o:p>

     - Très bien, merci beaucoup. A demain. » Et nous raccrochons. <o:p></o:p>

    Je ferme mon portable quand soudain je tilte. Demain ? Mais comment je vais passer l’après midi moi ? Je ne peux pas m’installer alors que le trou est là, béant ! Mais de là à le rappeler alors que je viens de me ridiculiser pendant dix minutes en le suppliant de faire quelque chose, c’est trop. J’ espère très fort ne pas avoir le droit au Retour de <st1:PersonName productid="la Vache II." w:st="on">la Vache II.</st1:PersonName> Cette fois le salon me parait beaucoup plus accueillant, même si je regrette de devoir rester enfermer alors qu’il y a un super soleil dehors. De toute façon j’ai oublier mon tube de crème solaire indice 90. <o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    Je tourne un peu en rond dans la maison. Je devrais profiter de cette solitude pour lire les romans que je dois lire pour la rentrée. Surtout qu’ensuite je râle parce que je n’ai pas une minute de libre pour le faire. Mais j’ai avec moi deux perles de la littérature : Faust I et II       de Goethe et Journal d’un voyage de Montaigne.  La deuxième partie du premier est si compliqué que même les grands critiques spécialisés n’arrivent pas à le commenter et le second est d’un ennuie total. Pendant près de 300 pages, l’auteur raconte le nombre de verres d’eau qu’il à bu dans chaque ville où il s’est arrêté lors de son voyage, le nombre de fois où il a été aux selles et le nombres de bains qu’il à pris en détaillant le temps qu’il a passé dans chacun d’eux. A mourir. C’est à vous déprimer de la littérature. Pour compenser j’ai aussi amener L’accro au shopping dit oui de Sophie Kinsella, mais celui là je le connais presque par cœur. Je sais, ma sélection n’est pas top, mais je ne m’attendais pas à finir toute seule je vous le rappelle !<o:p></o:p>

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     Je remonte dans les chambres et j’ouvre tout les placards. On ne sait jamais, je vais peut être découvrir un passage secret avec un long couloir souterrain. Puis au bout d’une heure de marche dans une ambiance lugubre mais où je garderai tout mon courage, je déboucherai dans une magnifique salle de bal où m’attendra un prince charmant endormi sur un grand fauteuil royal. Je le réveillerai d’un baiser. Au moment même où il ouvrira les yeux, il tombera follement amoureux de moi. On dansera au son d’une musique divine joué par des elfes blancs. Je porterai tout d’un coup la plus belle robe de chez Dior. Puis il m’emmènera visiter son beau palais climatisé. Et il m’offrira une immense bibliothèque avec la collection complète des Pockets. Et des Folios. Et des Livres de Poche. Ensuite, j’aurai le droit à un dîner romantique cuisiné par George Blanc en personne. J’en étais là de ma rêverie quand tout d’un coup, je découvre une grande planche en bois dans le fond d’une armoire. Je n’ai aucune idée de la raison pour laquelle on la rangé ici mais elle est idéale pour, par exemple, boucher les trous dans les clôtures. Toute contente je redescends, non sans me planter au passage une écharde dans l’index…<o:p></o:p>

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     Je pose la planche dans le fond du jardin puis je pars à la recherche d’outils. Bizarrement, mon premier réflexe est de chercher dans le tiroir à couvert de la cuisine. Et oui, chez mes parents, il y a toujours un tournevis multi pointe rangé là. Une idée à ma mère. D’un autre côté, partie comme je suis, j’aurais plutôt besoin de clous et d’un marteau pour accrocher la planche entre les deux poteaux en bois. Je ne trouve rien non plus sous le canapé, endroit où moi je range habituellement les outils. Je fini enfin par trouver mon bonheur dans le garage. Le premier problème, c’est qu’il y a tout un atelier en fait. Du coup j’ai le choix entre cinq marteaux différents et dix sortes de clous. Le second problème, c’est que je ne suis absolument pas douée en bricolage et je n’ai aucune idée de ce dont je vais avoir besoin. J’attrape donc au hasard les premiers qui me tombe sous la main. Je devrais m’en sortir... <o:p></o:p>

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    Pleine de bonne volonté, je m’atèle à la tâche. Je commence par vérifier soigneusement l’absence totale de vaches, d’insectes ou d’oiseaux dans mon périmètre de travail. Je soulève maladroitement la planche qui, par miracle, fait la taille exacte du trou ! C’est super, en deux minutes cette histoire sera réglée ! <o:p></o:p>

    Mais je décide de retourner dans la maison enlever l’écharde de mon doigt, parce qu’elle me fait mal. Une fois dans la salle de bain, je fais tomber ma pince à épiler. Comme elle est tombé entre le lavabo et la baignoire, je mets cinq bonnes minutes, en me contorsionnant de façon ridicule, à la récupérer. Et comme il a fallu que je vide entièrement ma trousse de toilette sur le sol de la salle de bain pour la localiser, je passe à deux doigts d’une gamelle spectaculaire en glissant sur le tube de dentifrice. Je me rattrape de justesse à la porte de la douche et je fini par réussir l’opération délicate d’extraction sans pleurer. Presque. Mais comme j’ai encore un peu mal et qu’une petite goutte de sang perle, je me mets un jolie pansement bleu. Avec ça, ça va tout de suite mieux, non ?<o:p></o:p>

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    Je retourne dans le jardin. Je revérifie l’absence total d’animaux. Tout à l’air tranquille. Je soulève la planche, tout en essayant de tenir un marteau et un clou. Ce n’est pas facile mais je fini, au prix d’énormes efforts des bras, à planter un clou. Fière de moi, je lâche la planche. Qui est bien sûr, trop lourde pour tenir avec un seul clou. Tout mon ouvrage tombe misérablement par terre. Je crois que c’est à cette minute précise de ma vie que j’ai le plus regretter l’absence de ma maman. Le bricolage, elle maîtrise. Elle sait faire, elle aime faire et moi, je me contente de lui apporter de temps en temps une tasse de thé. Voilà ma façon de bricoler : je demande aux autres de faire, et je m’occupe du ravitaillement en boissons. On appelle ça « échange de bon procédé ». <o:p></o:p>

    Hélas pour moi, aujourd’hui, je n’ai pas le choix. Mais j’ai déjà les bras en compote ! Une petite pause s’impose. Il fait si chaud !<o:p></o:p>

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    A l’intérieur, l’air est à peine plus frais. Et, comme je n’ai pas encore fait de courses,  la bouteille de limonade fraîche qui me fait fantasmer en cet instant est absente de mon frigo. Evidemment… Je me contente donc d’un grand verre d’eau tiède. <o:p></o:p>

    Retour devant la planche. Je la déteste de tout mon coeur mais je ne renonce pas. Je veux pouvoir profiter de la chaise longue ! Au final je passe six longues heures à travailler. Je suis même obligé de consolider les deux poteaux qui au passage, accroche mon tee-shirt au barbelé et le déchire un peu. Je suis obligé de trouver une pelle pour mettre de la terre autour des pieds, afin de consolider ma construction. J’arrive, à grand renfort de clous et de scotch à faire tenir ma planche. Je suis si contente de moi ! Bon, je dois avouer qu’objectivement, le résultat n’est pas très esthétique. Ma planche était en fait un peu trop courte, du coup les deux poteaux sont penchés. Et le scotch pendouille un peu. Mais l’ensemble tiens. A moi la bronzette ! <o:p></o:p>

     Je regarde l’heure. Il est près de vingt heures. Le soleil est déjà en train de se coucher. Brusquement, ça me donne envie de pleurer. J’ai des ampoules dans les mains. Mon travail est affreux. Je n’en profiterai pas aujourd’hui. J’ai soif. Une araignée est venue me rendre visite, j’ai en très peur. J’ai abîmé un vêtement que j’aime beaucoup. J’ai de la terre sur mon short en jean bleu clair.<o:p></o:p>

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    Chapitre 4<o:p></o:p>

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     Déprimée par cette mauvaise journée, je décide de prendre un long bain relaxant. Une fois dans la salle de bain, je commence à enlever mes vêtements. Et là, une douleur intense me traverse au moment où le tissus frotte le long de ma nuque. Je me regarde dans la glace. J’ai pris un énorme coup de soleil ! Mon visage, mon cou, mes avant-bras et même mes mains sont écarlates. J’étais si absorbé par mon entreprise que je n’ai pas fait attention. Comme j’ai la peau  très blanche, je passe l’été à me tartiner d’indice 90 mais là je l’ai totalement oublié. Maintenant ça me brûle. Très délicatement je prends une douche à peine tiède. Ça pique, c’est douloureux. Puis la séance de séchage est une autre torture. <o:p></o:p>

    Et au moment où je veux m’étaler une couche bienfaitrice de biafine, je sens tout le poids de la solitude. Comme je n’arrive pas à l’étaler correctement sur mon dos, j’en ai dans les cheveux et sur mon débardeur propre. En plus, contre coup d’une journée au soleil sans chapeau, je commence à avoir froid et mal à la tête. Quand je reverrai mes amis, je les étranglerai un peu pour m’avoir abandonné là, puis je  les attacherai en plein soleil, tout nus barbouillé de confiture, comme dans la chanson de Perret.

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     Le soir je savoure mon poulet rôti devant la télé. Le choix est limité, il y a la un, la deux, la trois, la cinq et la six. Ça change de mes trente-quatre chaînes à Paris, mais au moins le choix est vite fait. Je compense par le plaisir de manger avec les doigts comme une gamine.

    Enfin la soirée passe tout de même lentement.

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    La nuit s’annonce longue. Pas une voiture, pas un métro, pas un avion qui ne passe pour me bercer de son vacarme familier. Puis brusquement je sursaute violemment : la cloche de l’église sonne les onze coups. Ma maison se trouvant juste derrière, je dois être celle du village qui en profite le mieux. Je finis par m’endormir d’un sommeil agité. Je passe la nuit à rêver de vaches menaçantes qui m’en veulent d’avoir fermer le trou dans la clôtures. Du coup elles me poursuivent à travers les champs où personne ne m’entend quand j’appelle au secours.

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    Le lendemain, je suis réveillé à cinq heures du matin. Parce que les rideaux écrus, c’est sûrement très jolis, mais ça n’empêche absolument pas la lumière d’entrer dans la pièce. Il fait donc totalement jour dans ma chambre. En plus,tous les oiseaux du coin semblent s’être donné rendez-vous sous ma fenêtre pour me faire un concert privé. Vous croyez que je peux en assommer quelques uns, de mon lit, en lançant un ou deux coussins par la fenêtre ? La journée commence comme un matin… à la campagne. A part le chant des oiseaux un peu crispant et un chien, très loin, qui aboie, pas un bruit. Toujours aucun coup de klaxon, aucun camion poubelle bruyant, bref aucun signe sonore familier de vie ! La cloche de l’église résonne. Maintenant, c’est sûr, je ne pourrais plus me rendormir, autant me lever.

      Comme je n’ai toujours pas fait de courses dans un magasin digne de ce nom, je n’ai pas de café, pas de pain, pas de jus d’orange. Et à cinq heures du matin, je peux toujours attendre pour avoir mon croissant, d’ici que la boulangerie ouvre, je serai morte de faim. En fouillant dans les placard de la cuisine, je découvre le saint graal : un pot de confiture ! J’avoue, nature, c’est pas top, mais mon choix se réduit à confiture nature ou  reste de poulet rôti froid ou encore poulet rôti froid à la confiture. L’idée est un peu écœurante, c’est vrai.

      Pour oublier ma faim je décide de m’habiller et de faire un tour dans le village en attendant que les boutiques ouvrent. Une fois devant le miroir, je fais une découverte qui inscrit définitivement cette journée dans les annales des « jours les plus pourris de la galaxie ». Je suis victime des effets secondaires et violents du coup de soleil. Brûlure au vingt-cinquième degré sur le nez égal pelage assurer. Mon appendice nasal ne ressemble plus à rien, si ce n’est à un genre de choucroute bizarre, rouge et affreuse. La biafine apaise un peu la rougeur mais bon, c’est pas aujourd’hui que je défilerai pour l’Oréal…

      La journée étant définitivement ruinée, je sors un peu, histoire de profiter au moins de la fraîcheur matinale.

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    Chapitre 6<o:p></o:p>

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    Sur la place de village j’aperçois le boucher en train de charger sa camionnette blanche. Quand il me voit, il me fait signe de la main. Je me rappelle les vers qu’il m’avait cité la veille. C’est quand même intrigant. Et comme j’ai continué mon chemin sans ralentir, je suis maintenant obligé d’aller lui parler, à moins de faire un brusque demi-tour, ce qui serait totalement impoli. A mon approche, il me sourit gentiment.

      « Vous êtes bien matinale. Je croyais que les vacances étaient faîtes pour se reposer. 

    - J’ai bien essayé de dormir mais les oiseaux était d’un autre avis. »

    Je lui explique ensuite mon problème de rideaux quand je m’aperçois qu’il ne peut s’empêcher de fixer mon nez. Vu le carnage que c’est, je ne lui en veut même pas et j’enchaîne sur mon problème de vaches envahissantes. Il rigole un peu mais rajoute que si ça peut me rendre service, il pourra m’apporter une barrière. C’est chou…

     Le voyant jeter un coup d’œil à sa montre, je décide de continuer ma balade.

      «  J’ai été contente de vous revoir et de discuter un peu. (Mais pourquoi je dis ça ?) Mais je ne vais pas vous retenir plus longtemps. (voilà, remettons les choses en place tout de suite).

      - Oh mais non ! Vous ne me déranger absolument pas… Mais je suis en train de charger la camionnette pour partir au CERTO…vous savez le concours… »

    J’opine de la tête sans vraiment écouter ce qu’il bafouille. Je viens d’apercevoir dans des bocaux de choses multicolores flottants dans un liquide qui ressemble à de la gélatine. On dirait des bouts de caoutchouc multicolore dans du formol, comme dans un mauvais film de science-fiction. Si ça se trouve, en vérité, ce n’est pas un simple boucher de campagne mais un savant fou qui fait des expériences bizarres et illégales. Il fait des mélange étranges et il est sur le point de découvrir LA formule qui révolutionnera le monde, celle qui permettra de créer un vernis à ongle qui sèche en moins de sept seconde, qui tient trois semaines et qui pousse avec les ongles !

    -          Alors, vous êtes d’accord ?

    Je raterris brusquement sur terre. Je n’ai strictement aucune idée de ce qu’il vient de m’expliquer ni en quoi consiste sa demande. Vu l’air mi-souriant mi-suppliant qu’il fait, j’hésite un inst     ant avant de répondre.

     -Euh…et bien… oui... »

    Son sourire d’élargit et il ouvre la portière. Zut. Je ne sais pas ce que je viens d’accepter, mais je crois qu’il faut maintenant que je monte dans la camionnette. Je me rappelle son invitation de la veille et qu’il vient de réitérer sa demande, que je suis d’accord et que je vais faire le trajet avec lui. Je suis tellement en train de me sermonner moralement sur le fait qu’il faille écouter les gens quand ils vous parlent, que je ne trouve pas de moyen de refuser après avoir dit oui. Aucune excuse ne fonctionne, vu que je lui ai raconté que je n’avais rien à faire… A contre-cœur pour le moment, je m’installe.

     Sur la route, on commence à discuter. Il m’explique le principe du concours, le fait que son père et son grand-père déjà y participaient déjà avant lui et tout les efforts qu’il a fait cette année pour créer une terrine de veau aux myrtilles, sauce (boisson du coin).


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  • Un amour de Terrine
    Par Claire Delhomme.



    « Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,
    Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m'attends.
    J'irai par la forêt, j'irai par la montagne.
    Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps. »




    Chapitre 1

      Viens, tu verras, ça sera génial!
    Je restai septique et vous verrez que ce n’était pas à tord. Déjà, l’idée de louer une maison au fin fond de la campagne, même avec des amis, ça ne m’emballait pas trop. Je ne sais pas pour vous, mais moi, au bout de deux jours de verdure à perte de vue, j’ai tendance à faire des overdoses de chlorophylle. Jusque là, c’est vrai, ça allait à peu près. J’étais assise dans le TGV et sur le point d’arriver à Bourg-en –Bresse, où mes chers amis devaient venir me chercher.
    Puis  mon téléphone a sonné et là mon Fear Factor personnel a commencé. D’après ce qu’ils tentent de m’expliquer, il y aurai un tout petit changement programme qui fait que je serais seule quelques jours, oh, vraiment pas longtemps. J’écoute à peine leurs explications et leurs excuses. La seule chose que je comprends dans leur charabia c’est que je vais devoir passer les premiers jours de ces vacances si prometteuses abandonnée dans un village perdu au fin fond du néant campagnard, en plein mois d’août. Ce ne sera peut être que quelques jours mais j’ai déjà l’impression de démarrer un voyage de l’extrême. En plus, la climatisation du train est en panne depuis deux heures alors qu’il doit faire 72°c à l’ombre. Depuis Paris, j’en suis déjà à ma quatrième mini bouteille d’Evian, le môme insupportable assis à côté de moi commence à sentir dangereusement des pieds et je crois que mon mascara non water proof coule.
     « Génial » n’est peut-être pas exactement le qualificatif que j’aurai utilisé…

     Bien sûr, quand j’arrive à la gare, je ne trouve pas de taxi. Après avoir erré avec mon immense valise, mon sac à dos et mon sac à main top tendance mais énorme, j’atterri dans un café. Le patron est sympa avec moi et après avoir discuter un peu avec lui,  une solution semble se présenter. La façon la plus simple pour rejoindre le village d’indien où m’attend la location - à soixante petits kilomètres d’ici - c’est d’attendre le lendemain matin et de partir avec la boulangère, parce que le taxi est parti en vacances.  Mais non, ça la dérangera pas, c’est une amie à lui, et elle adore discuter alors ça lui fera plaisir d’avoir un peu de compagnie.
    De toute façon, vu les circonstances, je n’ai pas trop le choix.

     Le lendemain, après avoir passer une nuit dans un vieil hôtel, tenu par un vieux monsieur, j’embarque à bord d’une vieille camionnette – à croire qu’ils ont rien de neuf  ici- avec la vieille boulangère. Elle est plutôt gentille, le problème c’est qu’effectivement elle aime parler. Beaucoup. Trop. Et en plus, il y a un petit détail que je n’avais pas capté : ce n’est pas elle qui m’accompagne au village, c’est moi qui l’accompagne dans sa tournée ! Donc au lieu de mettre une demi heure, il nous faut trois heures de route, le temps de passer par tous les hameaux de la régions. Comme c’est une femme très serviable, elle a l’extrême amabilité de me faire l’historique de chaque clocher, de me retracer la généalogie de chaque famille et de me raconter les rumeurs de chaque coin de rue. J’adore les potins, mais savoir que Madame Simone avait déchiré une carte postale le mois dernier après avoir foutu une claque à Marcel, soit disant parce que son tracteur avait écrasé des géraniums, très honnêtement, je n’arrive pas à m’intéresser, oui, même en faisait un gros effort. Enfin bon, au bout de trois heures qui en valent mille, et où j’ai vaillamment résisté à l’envie  d’arracher le pare soleil pour assommer mon chauffeur bavard, j’arrive sur la place de Poncin.

     Ô joie, Ô bonheur. Me voilà tel Ulysse ayant enfin atteint les rivages d’Ithaque. Soulagée d’être enfin arriver, je remercie tout de même chaleureusement Martine. Mais mon bonheur est hélas de courte durée. Je regarde lentement autour de moi. Où suis-je encore tombée ? Qu’ai-je fais pour mériter ça ? Moi qui ai du mal à survivre loin du métro, de la place Soufflot et du jardin des plantes ?? C’est une mauvaise blague ou une caméra cachée, mais je refuse de croire que l’endroit « trop coooool » choisi par mes potes soit ce village de quatre-vingts seize habitants dont soixante-treize sont sûrement du troisième âge !
    Maintenant j’en suis tout à fait certaine : je vais mourir.
    En plus, si ça se trouve, se ne sont même pas des vieux mais des extraterrestres déguisés en humain, comme dans Men in Black, parce que franchement, quel humain voudrait s’exiler dans un trou pareil ? Ils vont prendre le contrôle de mon cerveau et m’obligé à labourer les champs avec mes super sandales qui seront ravagés par la terre. Puis ils me feront couper du bois pour l’hiver jusqu'à ce que mes mains aient des rides et des ampoules !

     Bon, comme je suis super courageuse, je soulève quand même mes bagages et je prends la première - et unique -  rue afin de trouver mon gîte. L’avantage, c’est que je risque pas de me tromper, il n’y en a qu’une seule avec l’affreux macaron « gîtes de France » et vu la taille du village, je ne risque pas de me perdre.
    Sauf que je n’étais pas censé être la première ici. Donc je n’ai pas les clés…
    Là, nouvelle angoisse. Il me faut bien dix minutes pour trouver un endroit où mon portable capte afin d’appeler mes amis pour avoir le numéro ou l’adresse du propriétaire. Ces dix minutes sont très significatives à mes yeux : je vais passer quelques jours seule au monde, dans un endroit où je n’aurais pas constamment cinq barrettes de réseau ! Je commence à avoir des sueurs froides. Respirer profondément, calmement. Je peux le faire.  Je finis par obtenir une tonalité et à établir une communication en me tenant debout sur un petit muret en ciment et en me penchant un peu.  Ouf.

    Une fois prévenu, le propriétaire ne met que quelques minutes à venir puisqu’il habite aussi dans le village. C’est un vieux monsieur (encore !), assez gentil, qui a un talent remarquable. En moins de trois minutes montre en main il arrive à me raconter une grande partie de sa vie marital, le caractère difficile de sa femme et à me demander d’arroser sa plante verte. Il parait que sa femme fait une allergie mais lui, il ne peut pas s’en passer, il l’adore, sa petite plante. Du coup il la mise dans la maison, et il vient tous les deux jours pour s’occuper d’elle. Il m’a dit le nom exact en français et en latin mais je l’ai instantanément oublié.  Ne voyant pas trop comment refuser ni comment lui expliquer que je n’ai absolument pas la main verte, j’accepte du bout des lèvres.
     Puis je découvre avec quelques appréhensions l’intérieur de la maison. Tout d’abord la cuisine. Immédiatement je me sens mieux. Il y a un four micro-onde qui me permettra de ne pas mourir de faim. Comble du luxe, je découvre ensuite une machine à café. Ma survie sera peut-être, je dit bien peut-être, possible finalement…
    Comme il est déjà presque midi, je décide de continuer mon exploration après le déjeuner. Sauf que… le frigo est vide. Evidemment. Heureusement, face aux grands problèmes, je n’ai jamais eu peur de prendre les grandes décisions nécessaires. Je décide donc immédiatement de planter un potager. D’un côté, je mettrais les légumes et de l’autre, des herbes aromatiques en tout genre. Et je construirai une petite fontaine en marbre blanc. Et je pourrai élever quelques poules et des lapins. Je construirai moi-même de beaux clapiers que je peindrai en rose et vert anis. J’ai vu ça dans déco, c’est top tendance pour les chambres. Et je ne vois pas pourquoi les lapins n’auraient pas le droit d’avoir de beaux murs. Et je ferais des tartes aux myrtilles. Ou une tarte au citron. Bien sûr il faut d’abord que je plante les arbres, mais ça je demanderai à ma maman, elle s’y connaît bien en plantation. Et je ferai des gratins aux légumes du jardins. Et je …

    J’avoue, en fait, j’ai juste fini de manger le paquet de petits Lu que j’avais encore dans mon sac, un paquet entier de fraises tagadas – d’ailleurs ça écœure très vite  -  et un chewing-gum. Le tout arroser d’un grand verre d’eau. Les poules, les arbres et la tarte attendront…

    Voilà, ça c’est fait… Maintenant grande question : comment vais-je occuper mon après-midi moi ? Ici, sans voiture, sans réseau, sans ordinateur, sans personne ? Pour ne pas tourner en rond, je prends ma valise et je commence à explorer mon nouvel intérieur. On appelle ça la « familiarisation avec le milieu hostile ». En premier, le salon. Rien de très intéressant, sauf un lecteur DVD. Mais je n’ai pas pris de DVD avec moi, évidemment. Je découvre aussi la plante dont je dois m’occuper. Elle trône, immense, dans un pot en plein milieu de la table de basse. Personnellement, je lui trouve rien de particulier, mais la botanique, ça n’a jamais été mon fort. En plus, je trouve qu’elle gêne sur la table. Je la soulève avec difficulté – elle pèse une tonne cinq au moins ! – et la pose dans un coin de la salle. Puis je découvre les toilettes. Il y a un petit cadre représentant une Sainte. Etrange idée que de l’accrocher là, non ? Mais bon, je ne veux pas juger. A l’étage, quatre chambres et deux salles de bain. Je prends tout mon temps pour choisir la plus belle pièce, les premiers arrivés sont les premiers servit, et toc ! Je m’installe tranquillement dans une belle pièce lumineuse avec de jolis rideaux écrus. Le lit grince un peu mais de toute façon, tous les lits où j’ai dormi, à la campagne, grinçaient. Je vide ma valise, je retouche mon gloss., je revérifie pour la cinquième fois l’absence de message sur mon répondeur… Il doit au moins être 14h là.

    Je vérifie avec espoir à mon poignet. 12h15. Et là, tout à coup, je ressens comme une vague de panique. A la campagne, le temps s’arrête. Je vérifie ce phénomène depuis que je suis toute petite. A chaque fois c’est pareil. Il suffit que je m’éloigne un peu des relais téléphone, qu’il y ait autour de moi trois champs ou plus et que je sois à moins  de deux cent mètre d’une vrai vache et là ça ne loupe jamais. Le temps s’arrête, l’air semble immobile et j’entends mon propre souffle. Je suis comme perdu dans le vide galactique. L’angoisse totale. J’ai du mal à respirer. J’ai besoin du contact de la civilisation. Rapidement ! Tout de suite !


    Chapitre 2

    C’est ainsi, avec la ferme attention de pactiser avec les peuplades de ces terres reculées, que je quitte la maison. J’adore les gâteaux secs, mais de la à ne manger que ça pendant trois jours, il y a tout un monde.
    Je sors dans la rue et me dirige lentement vers la place centrale. L’ambiance est menaçante. Il fait très chaud. Tout est silencieux. Le village semble désert. On se croirait dans un mauvais Western, surtout quand je vois une poule traverser la rue en picotant. Je pourrai croiser John Wayne que ça ne m’étonnerai qu’à moitié. J’essaye de me concentrer sur mon objectif : trouver de quoi remplir mon frigo. Je me laisse guider par l’odeur alléchante d’un poulet rôti. Cette solution est mille fois plus simple que de courir moi-même après une volaille qui refuse de ce laisser attraper.

    C’est ainsi que j'ai atterrie dans cette petite boucherie local. Tant mieux pour moi, cette boutique semble être le point de ralliement du village, là où tout se passe, là où ça bouge ! C'est-à-dire qu’au moment où j’arrive, il y a trois vieilles dames et le boucher qui discutent avec animation. Autant dire qu’il y a foule !
     La première des vieille est assise sur une chaise, son caddie rose fluo coller à elle. La seconde tiens dans ses bras un genre de caniche affreux blanc sale qui aboie aigu. Je déteste les chiens et encore plus les caniches qui aboient aigu. La troisième, superbe dans sa jolie blouse fleurie, très estivale, bouge avec conviction les bras dans tous les sens pour appuyer ses propos. Mais au moment où j’entre, j’assiste à un magnifique arrêt sur image grandeur nature. C’est impressionnant. En une fraction de seconde, les trois arrêtent leurs bavardages, se tournent vers moi et me passent au scanner intégral. C’est encore pire que lors d’un entretient d’embauche ! Faut dire que je ne dois pas avoir le look couleurs locales avec mes sandales compensées, mon sac à main top tendance et ma manucure nickel. Heureusement qu’elles ne savent pas que j’ai mon pass navigo dans une poche et un téléphone portable dernière génération dans l’autre. Puis, brusquement, comme si je n’avais jamais fais irruption dans leur monde, elles repartent de plus belles dans la critique gastronomique du dernier déjeuner de famille donner par la voisine, Madame Jeannine semble-t-il. Résignée à mourir d’ennuie debout en attendant mon tour, je passe en revue la boutique du regard. Elle a tous les détails du commerce de proximité villageois. A gauche de la porte, un grand bac remplie de paquets de chips en tout genre. Personnellement, je déteste ceux avec les goûts chimiques et bizarres genre « barbecue » ou « bolognaise » et pire encore : « oignon ». J’ai toujours eu un problème avec les produits « goût oignon ». Une fois, lors d’un voyage scolaire en Angleterre, alors que j’avais vraiment faim, une fille m’a proposer un muffins que sa famille d’accueil lui avait donné. A l’oignon. Sauf que je ne le savais pas. Et les muffins aux oignons, ce n’est pas bon du tout. Une autre fois, sur un marché de Noël de dégustation, j’avais pris une grande cuillère de confiture à la poire pour goûter. Et surprise ! Je n’avais pas pioché dans le bon pot et j’ai avalé une grande bouché de confiture à l’oignon. Et la confiture à l’oignon, quand on attend de la poire, ce n’est pas bon du tout non plus… Mais je m’égare là. Je pioche rapidement un paquet nature et je continue mon observation. Sur le même mur, il y avait des étagères avec des paquets de pâtes et des conserves en tout genre. Boucherie-épicerie, le grand luxe quoi... Le côté droit était occupé par la vitrine. J’ai toujours trouvé ça un peu écoeurant : les salades composés qui ne ressembles à rien, les pâtés en croûte, toutes ces… choses qui flottent dans de la gélatine brunâtre, et ces tranches de viandes sanguinolentes. Le pire dans tout ça, se sont les cervelles et les langues. Brrr… rien que d’y penser ça me donne la chair de poule. Je relève donc assez rapidement les yeux. Comme dans presque toutes les boucheries du pays, il y a un poster au mur avec un cochon rose en costume bleu et un chapeau à rayure, qui rigole. Je ne comprend pas. Pourquoi ont-ils tous cet affreux poster ? C’est un cadeau offert pour « toute boucherie ouverte » ? Et bien sûr, sur le comptoir, il y un autre petit cochon, en céramique celui là et avec une fente sur le dos. Il y a-t-il vraiment des gens qui donne un pourboire à leur boucher ?? Je trouve l’idée étrange, après tout on n’en donne pas dans les grands magasins, ou quand on achète un tee-shirt…
     L’attente s’éternise, c’est-à-dire que j’attends bientôt depuis plus de cinq minutes, ce qui est intenable pour quelqu’un qui comme moi, viens d’une ville où quand on marche au lieu de courir c’est qu’on est perdu ou touriste. Je tente alors de m’intéresser discrètement à la conversation.
      « Parait que le p’tit de la Jeanne, c’est le portrait craché de son père… c’est pas facile de commencer dans la vie avec un tel handicap…
      - C’est surtout triste pour la mère ! Si au moins il avait eu ses yeux, mais non ! En plus il parait qu’il suit les traces non recommandables de son frère…
      - C’est comme Luc, le fils de Madame Bourdin, hier il a été pris dans le jardin du vieux Maurice, en train de voler des framboises ! Il parait que… »
    L’anecdote est amusante mais je me lasse rapidement. Le boucher le remarque, ainsi que mon exaspération grandissante. Ok, c’est parce que je pianote des doigts sur le bord de la vitrine en soufflant un peu et en regardant en l’air depuis cinq minutes. Mais bon, je n’allais quand même pas rester ici, à attendre que les trois vieilles passent en revue toute la population du village, leurs descendances et les voisins des petits enfants ! Même si c’est drôle à écouter quelques instants.
     «  Alors mademoiselle, qu’est ce qu’il vous faut ?
    Heureuse que ça soit enfin mon tour, je réponds en souriant.
      - Un poulet rôti s’il vous plait.
      - Avec ou sans patates ?
      -  Sans, merci.
      - Je suis désolé, elles ne veulent pas partir…dit-il en agitant le sachet en papier.
      - Pardon ??
      - Les patates, elles ne veulent pas partir du sachet… »
    Avec un grand sourire, il secoue de nouveau le sac sur lequel est représenté une petite poule brune entourée de pommes de terre de jaunes, sur un fond de campagne. Je comprends la blague, il parle du dessin. C’est misérable. Mais au moins, maintenant je sais pourquoi il y a foule dans sa boutique : c’est LE rigolo du village, celui qui y met de l’animation, qui le fait vivre ! Je tente un pauvre sourire mais je ne pense pas que soit très convainquant. La blague n’est vraiment pas assez drôle. Je dois vraiment faire une tête bizarre, parce qu’il rajoute :
      «  N’attristez pas votre front gracieux, ce n’est qu’une blague, continuez à sourire, c’est si joli.  Et il me fait un petit clin d’œil en emballant mon futur dîner. Là, je suis étonnée. Je dois faire erreur, ce n’est pas possible. Non, sérieusement ?
      - Désolée, je dois rêver debout, mais merci, c’est gentil à vous…
      - Riez pourtant !
      - Du sort ignorez la puissance… »
    C’est à son tour de faire un grand sourire. Je ne rêvais donc pas. Il est en train de me citer A une jeune fille de Victor Hugo. Je décide de le tester encore un peu, on ne sait jamais. Je lance au hasard :
    «  Maintenant que Paris, ses pavés et ses marbres …
      - Et sa brume et ses toits sont bien loin de mes yeux ;
      Maintenant que je suis sous les branches des arbres…
      Et que je puis songer à la beauté des cieux … »
     A Villequier. Comme ça, sans hésiter, il complète les vers d’un poème inconnu pour la plupart des littéraires que je fréquente habituellement. J’en reste bouche bée. Il a fallu que ça tombe sur un boucher perdu au fin fond de la campagne. J’ai tellement du mal à y croire que je tente un dernier vers.
     «  Le rêve et la brume…
      -Vont où va la nuit ;
      Paupières et roses
      S'ouvrent demi-closes ;
      Du réveil des choses
      On entend le bruit. »
      L’aurore s’allume. Sans faute, sans oublier un mot, il récite la fin de la strophe. Cet instant est magique. Pour la première fois de ma vie, je rencontre un homme qui :
    1)    sache du Victor Hugo par cœur.
    2)    Ait moins de cinquante ans et ne sois pas à moitié chauve.
    3)    Ait un plan B dans la vie autre que chanteur, poète ou clochard-bôhème.

     Lui aussi à l’air content. Les trois vieilles, elles, sont muettes. On dirait trois statuts mais je suis certaine qu’elles ne perdent pas un mot de la conversation. Je soit sûrement être en train de leur donner matière à causer pour les vingt prochains hivers. Il me tend le poulet et les chips. Je paye et je m’apprête à quitter la boutique quand il me demande timidement :
      - Mademoiselle, si je peux me permettre, si cela vous intéresse, il y a le serto à Nantua, demain matin, vous devriez venir…
      - Le quoi ?
     Devant mon ignorance, la vieille au caddie se met à pouffer. Je la calme immédiatement avec le regard-qui-tue-numéro-17.
      - Le C-R-T-O. répète-t-il avec amabilité. Le Concours Régional de la Terrine d’Or.  En disant ça il rougit jusqu’à la racine des cheveux.
      - Et bien, euh… pourquoi pas…
    Pourquoi pas ? J’ai déjà une très bonne raison qui me vient instantanément à l’esprit : parce que je ne veux pas aller à une assemblée de rustres qui se réunissent pour manger du pâté en parlant cochon et volaille.
      - Je ne sais pas, peut-être…
      - Ça me ferai plaisir…
    Il est tellemtent cramoisi que ça en devient touchant.
      -  Je verrai… Au revoir Monsieur. »

    Chapitre 3

     De retour à la maison, je repense à la scène. Victor Hugo par cœur quand même ! Où alors il n’en connaît que trois et il a eu beaucoup de chance. Mais les probabilités sont minces. En plus il était plutôt mignon dans son genre… mis à part le gros tatouage en forme de scorpion sur son bras droit et le petit en forme de triskèle celtique sur le poignet gauche. Je n’aime pas trop les tatouages, pour moi ça fait homme-qui-veut-faire-viril ou femme-qui-veut-faire-sexy alors qu’en fait, ça fait juste dessin-horrible-surtout-quand-on-vieilli. Mais bon, chacun ses lubies. Moi ça fait des années que je collectionne les dauphins en porcelaine pour les détruire, et personne ne comprend pourquoi…

    J’étais en train de m’installer une chaise longue dans le petit jardinet derrière la maison, toute entière à mon analyse quand soudain la peur de ma vie ! Je me retrouve presque nez à nez avec une gigantesque vache ! Elle, pas un battement de cil, pas un poil qui bouge, elle me regardait tranquillement en mâchouillant un touffe d’herbe. Et en bavant un peu. Pour moi, les animaux, c’est encore pire que la campagne. Que ça soit un escargot mignon, un chien gentil, un bébé phoque trop chou ou une Montbéliarde énorme qui s’appelle Marguerite – ça je le sais parce que c’est écrit sur l’étiquette orange de son oreille – je flippe.
    Je vais vous expliquer. Pour la plupart des humains il y a différentes catégories d’animaux: les insectes, les mammifères, les poissons, les reptiles, les oiseaux… bref tout est bien ordonné selon des tas de critères précis. Chez moi c’est beaucoup plus simple : il y a les animaux dangereux d’une part et les animaux très dangereux d’autre part. Ou alors quand je fais un effort, il peut y avoir : les animaux à éviter, les animmaux à éviter à tout prix, les animaux flippants et les animaux répugnants. Pourtant il faut faire attention. Même si je déteste toutes les bêtes, cela ne m’empêche pas d’être révoltée quand on les maltraite, d’être farouchement opposé au port de la fourrure et des bijoux en ivoire et de haïr les méchants qui font des marées noires qui tuent les oiseaux et les poissons. J’aime les animaux, mais de loin.
    Donc je me retrouve nez à nez avec Marguerite. La situation est totalement ridicule. Elle porte un nom de jolie petite fleur des prés alors qu’elle fait au moins un mètre cinquante au garrot pour huit cent kilo de viande ! Elle s’est sûrement échapper du champ voisin pour venir brouter dans mon carré d’herbe. Et ce n’est pas moi, avec mes cinquante-cinq kilo tout mouillé, mon livre et ma chaise longue, qui vais la déplacer. Surtout que tout mon être refuse catégoriquement de s’approcher. Brusquement, toujours sans bouger, elle me lance un long meuuuuuuuuuh. Je fais un bond de cinq mètres en arrière tellement je sursaute fort. Je suis sûre qu’en plus, elle se moque de moi, on dirait vraiment la Vache qui Rit quand elle me regarde.
    Puis, toujours tranquillement elle se met à avancer vers moi. Panique ! Elle se rapproche ! Alerte rouge ! Je me fais attaquer par un monstre à cornes ! Elle a une langue gigantesque qu’elle utilise pour nettoyer son  nez qui coule ! Beurk ! Au secours !
    N’écoutant que mon instinct de survie, je fais une prudente retraite dans la maison en priant très fort tous les dieux, même ceux de la mythologie grecque, de me sortir de ce mauvais pas. Je pense qu’ils m’ont entendu vu que la vache, après avoir distraitement fait un tour sur la terrasse en ciment, fait demi-tour. Je la suis du regard. Il y a dans le fond du jardin un trou dans la clôture, qui donne directement sur un troupeau. Je vais devoir vivre face à dix génisses plus grosse que ma voiture pendant deux semaines. C’est sûr, je vais mourir. Le milieu est bien trop hostile. En plus, il y a maintenant une énorme bousse à moins d’un mètre de ma chaise longue…

     J’appelle donc immédiatement le propriétaire de la maison - cool, je capte bien dans le jardin ! - pour lui expliquer mon problème d’invasion. Il a le culot de se marrer ! Il ne dois pas comprendre la détresse qui est mienne en cet instant. Savoir qu’a chaque instant mon espace vital peut être envahi par un représentant vivant de l’espèce animal est une angoisse que je ne peux pas supporter.  Au lieu de compatir, il me dit que ce trou existe depuis des années, que ce n’est pas grave, qu’en général les vaches ont la trouille et qu’elles ne devraient plus revenir maintenant qu’elles ont vu que la maison était de nouveau occupée. Mais ma voix commence à monter dangereusement dans les aigus. Je dois avoir l’air hystérique puisque au bout d’un moment il fini par accepter de venir régler mon problème de cohabitation. Je le remercie chaleureusement quand il me dit :
     «  Bon et bien au revoir, je passerai demain.
     - Très bien, merci beaucoup. A demain. » Et nous raccrochons.
    Je ferme mon portable quand soudain je tilte. Demain ? Mais comment je vais passer l’après midi moi ? Je ne peux pas m’installer alors que le trou est là, béant ! Mais de là à le rappeler alors que je viens de me ridiculiser pendant dix minutes en le suppliant de faire quelque chose, c’est trop. J’ espère très fort ne pas avoir le droit au Retour de la Vache II. Cette fois le salon me parait beaucoup plus accueillant, même si je regrette de devoir rester enfermer alors qu’il y a un super soleil dehors. De toute façon j’ai oublier mon tube de crème solaire indice 90.

    Je tourne un peu en rond dans la maison. Je devrais profiter de cette solitude pour lire les romans que je dois lire pour la rentrée. Surtout qu’ensuite je râle parce que je n’ai pas une minute de libre pour le faire. Mais j’ai avec moi deux perles de la littérature : Faust I et II       de Goethe et Journal d’un voyage de Montaigne.  La deuxième partie du premier est si compliqué que même les grands critiques spécialisés n’arrivent pas à le commenter et le second est d’un ennuie total. Pendant près de 300 pages, l’auteur raconte le nombre de verres d’eau qu’il à bu dans chaque ville où il s’est arrêté lors de son voyage, le nombre de fois où il a été aux selles et le nombres de bains qu’il à pris en détaillant le temps qu’il a passé dans chacun d’eux. A mourir. C’est à vous déprimer de la littérature. Pour compenser j’ai aussi amener L’accro au shopping dit oui de Sophie Kinsella, mais celui là je le connais presque par cœur. Je sais, ma sélection n’est pas top, mais je ne m’attendais pas à finir toute seule je vous le rappelle !

     Je remonte dans les chambres et j’ouvre tout les placards. On ne sait jamais, je vais peut être découvrir un passage secret avec un long couloir souterrain. Puis au bout d’une heure de marche dans une ambiance lugubre mais où je garderai tout mon courage, je déboucherai dans une magnifique salle de bal où m’attendra un prince charmant endormi sur un grand fauteuil royal. Je le réveillerai d’un baiser. Au moment même où il ouvrira les yeux, il tombera follement amoureux de moi. On dansera au son d’une musique divine joué par des elfes blancs. Je porterai tout d’un coup la plus belle robe de chez Dior. Puis il m’emmènera visiter son beau palais climatisé. Et il m’offrira une immense bibliothèque avec la collection complète des Pockets. Et des Folios. Et des Livres de Poche. Ensuite, j’aurai le droit à un dîner romantique cuisiné par George Blanc en personne. J’en étais là de ma rêverie quand tout d’un coup, je découvre une grande planche en bois dans le fond d’une armoire. Je n’ai aucune idée de la raison pour laquelle on la rangé ici mais elle est idéale pour, par exemple, boucher les trous dans les clôtures. Toute contente je redescends, non sans me planter au passage une écharde dans l’index…

     Je pose la planche dans le fond du jardin puis je pars à la recherche d’outils. Bizarrement, mon premier réflexe est de chercher dans le tiroir à couvert de la cuisine. Et oui, chez mes parents, il y a toujours un tournevis multi pointe rangé là. Une idée à ma mère. D’un autre côté, partie comme je suis, j’aurais plutôt besoin de clous et d’un marteau pour accrocher la planche entre les deux poteaux en bois. Je ne trouve rien non plus sous le canapé, endroit où moi je range habituellement les outils. Je fini enfin par trouver mon bonheur dans le garage. Le premier problème, c’est qu’il y a tout un atelier en fait. Du coup j’ai le choix entre cinq marteaux différents et dix sortes de clous. Le second problème, c’est que je ne suis absolument pas douée en bricolage et je n’ai aucune idée de ce dont je vais avoir besoin. J’attrape donc au hasard les premiers qui me tombe sous la main. Je devrais m’en sortir...

    Pleine de bonne volonté, je m’atèle à la tâche. Je commence par vérifier soigneusement l’absence totale de vaches, d’insectes ou d’oiseaux dans mon périmètre de travail. Je soulève maladroitement la planche qui, par miracle, fait la taille exacte du trou ! C’est super, en deux minutes cette histoire sera réglée !
    Mais je décide de retourner dans la maison enlever l’écharde de mon doigt, parce qu’elle me fait mal. Une fois dans la salle de bain, je fais tomber ma pince à épiler. Comme elle est tombé entre le lavabo et la baignoire, je mets cinq bonnes minutes, en me contorsionnant de façon ridicule, à la récupérer. Et comme il a fallu que je vide entièrement ma trousse de toilette sur le sol de la salle de bain pour la localiser, je passe à deux doigts d’une gamelle spectaculaire en glissant sur le tube de dentifrice. Je me rattrape de justesse à la porte de la douche et je fini par réussir l’opération délicate d’extraction sans pleurer. Presque. Mais comme j’ai encore un peu mal et qu’une petite goutte de sang perle, je me mets un jolie pansement bleu. Avec ça, ça va tout de suite mieux, non ?

    Je retourne dans le jardin. Je revérifie l’absence total d’animaux. Tout à l’air tranquille. Je soulève la planche, tout en essayant de tenir un marteau et un clou. Ce n’est pas facile mais je fini, au prix d’énormes efforts des bras, à planter un clou. Fière de moi, je lâche la planche. Qui est bien sûr, trop lourde pour tenir avec un seul clou. Tout mon ouvrage tombe misérablement par terre. Je crois que c’est à cette minute précise de ma vie que j’ai le plus regretter l’absence de ma maman. Le bricolage, elle maîtrise. Elle sait faire, elle aime faire et moi, je me contente de lui apporter de temps en temps une tasse de thé. Voilà ma façon de bricoler : je demande aux autres de faire, et je m’occupe du ravitaillement en boissons. On appelle ça « échange de bon procédé ».
    Hélas pour moi, aujourd’hui, je n’ai pas le choix. Mais j’ai déjà les bras en compote ! Une petite pause s’impose. Il fait si chaud !

    A l’intérieur, l’air est à peine plus frais. Et, comme je n’ai pas encore fait de courses,  la bouteille de limonade fraîche qui me fait fantasmer en cet instant est absente de mon frigo. Evidemment… Je me contente donc d’un grand verre d’eau tiède.
    Retour devant la planche. Je la déteste de tout mon coeur mais je ne renonce pas. Je veux pouvoir profiter de la chaise longue ! Au final je passe six longues heures à travailler. Je suis même obligé de consolider les deux poteaux qui au passage, accroche mon tee-shirt au barbelé et le déchire un peu. Je suis obligé de trouver une pelle pour mettre de la terre autour des pieds, afin de consolider ma construction. J’arrive, à grand renfort de clous et de scotch à faire tenir ma planche. Je suis si contente de moi ! Bon, je dois avouer qu’objectivement, le résultat n’est pas très esthétique. Ma planche était en fait un peu trop courte, du coup les deux poteaux sont penchés. Et le scotch pendouille un peu. Mais l’ensemble tiens. A moi la bronzette !
     Je regarde l’heure. Il est près de vingt heures. Le soleil est déjà en train de se coucher. Brusquement, ça me donne envie de pleurer. J’ai des ampoules dans les mains. Mon travail est affreux. Je n’en profiterai pas aujourd’hui. J’ai soif. Une araignée est venue me rendre visite, j’ai en très peur. J’ai abîmé un vêtement que j’aime beaucoup. J’ai de la terre sur mon short en jean bleu clair.
     
    Chapitre 4

     Déprimée par cette mauvaise journée, je décide de prendre un long bain relaxant. Une fois dans la salle de bain, je commence à enlever mes vêtements. Et là, une douleur intense me traverse au moment où le tissus frotte le long de ma nuque. Je me regarde dans la glace. J’ai pris un énorme coup de soleil ! Mon visage, mon cou, mes avant-bras et même mes mains sont écarlates. J’étais si absorbé par mon entreprise que je n’ai pas fait attention. Comme j’ai la peau  très blanche, je passe l’été à me tartiner d’indice 90 mais là je l’ai totalement oublié. Maintenant ça me brûle. Très délicatement je prends une douche à peine tiède. Ça pique, c’est douloureux. Puis la séance de séchage est une autre torture.
    Et au moment où je veux m’étaler une couche bienfaitrice de biafine, je sens tout le poids de la solitude. Comme je n’arrive pas à l’étaler correctement sur mon dos, j’en ai dans les cheveux et sur mon débardeur propre. En plus, contre coup d’une journée au soleil sans chapeau, je commence à avoir froid et mal à la tête. Quand je reverrai mes amis, je les étranglerai un peu pour m’avoir abandonné là, puis je  les attacherai en plein soleil, tout nus barbouillé de confiture, comme dans la chanson de Perret.

     Le soir je savoure mon poulet rôti devant la télé. Le choix est limité, il y a la un, la deux, la trois, la cinq et la six. Ça change de mes trente-quatre chaînes à Paris, mais au moins le choix est vite fait. Je compense par le plaisir de manger avec les doigts comme une gamine.
    Enfin la soirée passe tout de même lentement.


    La nuit s’annonce longue. Pas une voiture, pas un métro, pas un avion qui ne passe pour me bercer de son vacarme familier. Puis brusquement je sursaute violemment : la cloche de l’église sonne les onze coups. Ma maison se trouvant juste derrière, je dois être celle du village qui en profite le mieux. Je finis par m’endormir d’un sommeil agité. Je passe la nuit à rêver de vaches menaçantes qui m’en veulent d’avoir fermer le trou dans la clôtures. Du coup elles me poursuivent à travers les champs où personne ne m’entend quand j’appelle au secours.

    Le lendemain, je suis réveillé à cinq heures du matin. Parce que les rideaux écrus, c’est sûrement très jolis, mais ça n’empêche absolument pas la lumière d’entrer dans la pièce. Il fait donc totalement jour dans ma chambre. En plus,tous les oiseaux du coin semblent s’être donné rendez-vous sous ma fenêtre pour me faire un concert privé. Vous croyez que je peux en assommer quelques uns, de mon lit, en lançant un ou deux coussins par la fenêtre ? La journée commence comme un matin… à la campagne. A part le chant des oiseaux un peu crispant et un chien, très loin, qui aboie, pas un bruit. Toujours aucun coup de klaxon, aucun camion poubelle bruyant, bref aucun signe sonore familier de vie ! La cloche de l’église résonne. Maintenant, c’est sûr, je ne pourrais plus me rendormir, autant me lever.
      Comme je n’ai toujours pas fait de courses dans un magasin digne de ce nom, je n’ai pas de café, pas de pain, pas de jus d’orange. Et à cinq heures du matin, je peux toujours attendre pour avoir mon croissant, d’ici que la boulangerie ouvre, je serai morte de faim. En fouillant dans les placard de la cuisine, je découvre le saint graal : un pot de confiture ! J’avoue, nature, c’est pas top, mais mon choix se réduit à confiture nature ou  reste de poulet rôti froid ou encore poulet rôti froid à la confiture. L’idée est un peu écœurante, c’est vrai.
      Pour oublier ma faim je décide de m’habiller et de faire un tour dans le village en attendant que les boutiques ouvrent. Une fois devant le miroir, je fais une découverte qui inscrit définitivement cette journée dans les annales des « jours les plus pourris de la galaxie ». Je suis victime des effets secondaires et violents du coup de soleil. Brûlure au vingt-cinquième degré sur le nez égal pelage assurer. Mon appendice nasal ne ressemble plus à rien, si ce n’est à un genre de choucroute bizarre, rouge et affreuse. La biafine apaise un peu la rougeur mais bon, c’est pas aujourd’hui que je défilerai pour l’Oréal…
      La journée étant définitivement ruinée, je sors un peu, histoire de profiter au moins de la fraîcheur matinale.

    Chapitre 6

    Sur la place de village j’aperçois le boucher en train de charger sa camionnette blanche. Quand il me voit, il me fait signe de la main. Je me rappelle les vers qu’il m’avait cité la veille. C’est quand même intrigant. Et comme j’ai continué mon chemin sans ralentir, je suis maintenant obligé d’aller lui parler, à moins de faire un brusque demi-tour, ce qui serait totalement impoli. A mon approche, il me sourit gentiment.
      « Vous êtes bien matinale. Je croyais que les vacances étaient faîtes pour se reposer.
    - J’ai bien essayé de dormir mais les oiseaux était d’un autre avis. »
    Je lui explique ensuite mon problème de rideaux quand je m’aperçois qu’il ne peut s’empêcher de fixer mon nez. Vu le carnage que c’est, je ne lui en veut même pas et j’enchaîne sur mon problème de vaches envahissantes. Il rigole un peu mais rajoute que si ça peut me rendre service, il pourra m’apporter une barrière. C’est chou…
     Le voyant jeter un coup d’œil à sa montre, je décide de continuer ma balade.
      «  J’ai été contente de vous revoir et de discuter un peu. (Mais pourquoi je dis ça ?) Mais je ne vais pas vous retenir plus longtemps. (voilà, remettons les choses en place tout de suite).
      - Oh mais non ! Vous ne me déranger absolument pas… Mais je suis en train de charger la camionnette pour partir au CERTO…vous savez le concours… »
    J’opine de la tête sans vraiment écouter ce qu’il bafouille. Je viens d’apercevoir dans des bocaux de choses multicolores flottants dans un liquide qui ressemble à de la gélatine. On dirait des bouts de caoutchouc multicolore dans du formol, comme dans un mauvais film de science-fiction. Si ça se trouve, en vérité, ce n’est pas un simple boucher de campagne mais un savant fou qui fait des expériences bizarres et illégales. Il fait des mélange étranges et il est sur le point de découvrir LA formule qui révolutionnera le monde, celle qui permettra de créer un vernis à ongle qui sèche en moins de sept seconde, qui tient trois semaines et qui pousse avec les ongles !
    -    Alors, vous êtes d’accord ?
    Je raterris brusquement sur terre. Je n’ai strictement aucune idée de ce qu’il vient de m’expliquer ni en quoi consiste sa demande. Vu l’air mi-souriant mi-suppliant qu’il fait, j’hésite un inst    ant avant de répondre.
     -Euh…et bien… oui... »
    Son sourire d’élargit et il ouvre la portière. Zut. Je ne sais pas ce que je viens d’accepter, mais je crois qu’il faut maintenant que je monte dans la camionnette. Je me rappelle son invitation de la veille et qu’il vient de réitérer sa demande, que je suis d’accord et que je vais faire le trajet avec lui. Je suis tellement en train de me sermonner moralement sur le fait qu’il faille écouter les gens quand ils vous parlent, que je ne trouve pas de moyen de refuser après avoir dit oui. Aucune excuse ne fonctionne, vu que je lui ai raconté que je n’avais rien à faire… A contre-cœur pour le moment, je m’installe.
     

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  • Un amour de Terrine
    Par Claire Delhomme.


    Chapitre 1

      Viens, tu verras, ça sera génial!
    Je restai septique et vous verrez que ce n’était pas à tord. Déjà, l’idée de louer une maison au fin fond de la campagne, même avec des amis, ça ne m’emballait pas trop. Je ne sais pas pour vous, mais moi, au bout de deux jours de verdure à perte de vue, j’ai tendance à faire des overdoses de chlorophylle. Jusque là, c’est vrai, ça allait à peu près, j’étais assise dans le TGV et sur le point d’arriver à Bourg-en –Bresse, où mes chers amis devaient venir me chercher.
    Et puis mon téléphone a sonné et là mes mésaventures ont commencé. D’après ce qu’ils m’expliquent, il y aurai un tout petit changement programme qui fait que je serais seule quelques jours, oh, vraiment pas longtemps. J’écoute à peine leurs explications et leurs excuses. La seule chose que je comprends c’est que je vais devoir passer les premiers jours de ces vacances si prometteuses abandonnée dans un village perdu au fin fond du néant campagnard, en plein mois d’août. Ce ne sera peut être que quelques jours mais j’ai déjà l’impression de démarrer un voyage de l’extrême. En plus, la climatisation du train est en panne depuis 2 heures alors qu’il doit faire 72°c à l’ombre. Depuis Paris, j’en suis déjà à ma quatrième mini bouteille d’Evian, le môme insupportable assis à côté de moi commence à sentir dangereusement des pieds et je crois que mon mascara non water proof coule.
     « Génial » n’est peut-être pas exactement le bon qualificatif…

     Bien sûr, quand j’arrive à la gare, je ne trouve pas de taxi. Après avoir erré avec mon énorme valise, mon sac à dos et mon sac à main top tendance mais énorme, j’atterri dans un café. Le patron est sympa avec moi et après avoir discuter un peu avec lui,  il semble que le moyen le plus simple pour rejoindre le village d’indien où m’attend la location - à soixante petits kilomètres d’ici - c’est d’attendre le lendemain matin et de partir avec la boulangère, parce que le taxi est parti en vacances.  Mais non, ça la dérangera pas, c’est une amie à lui, et elle adore discuter alors ça lui fera plaisir d’avoir un peu de compagnie. Bon, va pour la boulangère. De toute façon, vu les circonstances, je n’ai pas trop le choix.

     Le lendemain, après avoir passer une nuit dans un vieil hôtel, tenu par un vieux monsieur, j’embarque à bord d’une vieille camionnette – à croire qu’ils ont rien de neuf  ici- avec la vieille boulangère. Elle est plutôt sympa, le problème c’est qu’effectivement elle aime parler. Beaucoup. Trop. Et en plus, il y a un petit détail que je n’avais pas capté : ce n’est pas elle qui m’accompagne au village, c’est moi qui l’accompagne dans sa tournée ! Donc au lieu de mettre une demi heure, il nous faut trois heures de route, le temps de passer par tous les hameaux de la régions. Comme c’est une gentille femme, elle a l’extrême amabilité de me faire l’historique de chaque clocher, de me retracer la généalogie de chaque famille et de me raconter les rumeurs de chaque coin de rue. J’adore les potins, mais savoir que Madame Simone avait déchiré une carte postale le mois dernier après avoir foutu une claque à Marcel, soit disant parce que son tracteur avait écrasé des géraniums, très honnêtement, je n’arrive pas à m’intéresser, oui, même en faisait un gros effort. Enfin bon, au bout de trois heures qui en valent mille, et où j’ai vaillamment résisté à l’envie  d’arracher le pare soleil pour assommer mon chauffeur bavard, j’arrive sur la place de Poncin.

     Ô joie, Ô bonheur. Me voilà tel Ulysse ayant enfin atteint les rivages d’Ithaque. Soulagée d’être enfin arriver, je remercie tout de même chaleureusement Martine. Mais mon bonheur est hélas de courte durée. Je regarde lentement autour de moi. Où suis-je encore tombée ? Qu’ai-je fais pour mériter ça ? Moi qui ai du mal à survivre loin du métro, de la place Soufflot et du jardin des plantes ?? C’est une mauvaise blague ou une caméra cachée, mais je refuse de croire que l’endroit « trop coooool » choisi par mes potes soit ce village de quatre-vingts seize habitants dont soixante-treize sont sûrement du troisième âge ! Maintenant j’en suis tout à fait certaine : je vais mourir. En plus, si ça se trouve, se ne sont même pas des vieux mais des extraterrestres déguisés en humain, comme dans Men in Black, parce que franchement, quel humain voudrait s’exiler dans un trou pareil ? Ils vont prendre le contrôle de mon cerveau et m’obligé à labourer les champs avec mes super sandales qui seront ravagés par la terre. Puis ils me feront couper du bois pour l’hiver jusqu'à ce que mes mains aient des rides !

     Bon, comme je suis super courageuse, je soulève quand même mes bagages et je prends la première - et unique -  rue afin de trouver mon gîte. L’avantage, c’est que je risque pas de me tromper, il n’y en a qu’une seule avec l’affreux macaron « gîtes de France » et vu la taille du village, je ne risque pas de me perdre.
    Sauf que je n’étais pas censé être la première ici. Donc je n’ai pas les clés… Là, nouvelle angoisse. Il me faut bien dix minutes pour trouver un endroit où mon portable capte afin d’appeler mes amis pour avoir le numéro ou l’adresse du propriétaire. Ces dix minutes sont très significatives à mes yeux : je vais passer quelques jours seule au monde, dans un endroit où je n’aurais pas constamment cinq barrettes de réseau ! Je commence à avoir des sueurs froides. Respirer profondément, calmement. Je peux le faire.  Je finis par obtenir une tonalité et à récupérer le numéro. Ouf.

    Une fois prévenu, le propriétaire ne met que quelques minutes à venir puisqu’il habite aussi dans le village. C’est un vieux monsieur (encore !), assez gentil, qui a un talent remarquable. En moins de trois minutes montre en main il arrive à me raconter une grande partie de sa vie marital, son mariage, le caractère difficile de sa femme et est ce que je veux bien arroser sa plante verte ? Il parait que sa femme fait une allergie mais lui, il ne peut pas s’en passer, il l’adore, sa petite plante. Du coup il la mise dans la maison, et il vient tous les deux jours pour s’occuper d’elle. Il m’a dit le nom exact en français et en latin mais je l’ai instantanément oublié.  Ne voyant pas trop comment refuser ni comment lui expliquer que je n’ai absolument pas la main verte, j’accepte du bout des lèvres.
     Puis je découvre avec quelques appréhensions l’intérieur de la maison. Tout d’abord la cuisine. Immédiatement je me sens mieux. Il y a un four micro-onde qui me permettra de ne pas mourir de faim. Comble du luxe, je découvre ensuite une machine à café. Ma survie sera peut-être, je dit bien peut-être, possible finalement…
    Comme il est déjà presque midi, je décide de continuer mon exploration après le déjeuner. Sauf que… le frigo est vide. Evidemment. Heureusement, face aux grands problèmes, je n’ai jamais eu peur de prendre les grandes décisions nécessaires. Je décide donc immédiatement de planter un potager. D’un côté, je mettrais les légumes et de l’autre, des herbes aromatiques en tout genre. Et je construirai une petite fontaine en marbre blanc. Et je pourrai élever quelques poules et des lapins. Je construirai moi-même de beaux clapiers que je peindrai en rose et vert anis. J’ai vu ça dans déco, c’est top tendance pour les chambres. Et je ne vois pas pourquoi les lapins n’auraient pas le droit d’avoir de beaux murs. Et je ferais des tartes aux myrtilles. Ou une tarte au citron. Bien sûr il faut d’abord que je plante les arbres, mais ça je demanderai à ma maman, elle s’y connaît bien en plantation. Et je ferai des gratins aux légumes du jardins. Et je …

    J’avoue, en fait, j’ai juste fini de manger le paquet de petits Lu que j’avais encore dans mon sac, un paquet entier de fraises tagadas – d’ailleurs ça écœure très vite  -  et un chewing-gum. Le tout arroser d’un grand verre d’eau. Les poules, les arbres et la tarte attendront…

    Voilà, ça c’est fait… Maintenant grande question : comment vais-je occuper mon après-midi moi ? Ici, sans voiture, sans réseau, sans ordinateur, sans personne ? Pour ne pas tourner en rond, je prends ma valise et je commence à explorer mon nouvel intérieur. On appelle ça la « familiarisation avec le milieu hostile ». En premier, le salon. Rien de très intéressant, sauf un lecteur DVD. Mais je n’ai pas pris de DVD avec moi, évidemment. Je découvre aussi la plante dont je dois m’occuper. Elle trône, immense, dans un pot en plein milieu de la table de basse. Personnellement, je lui trouve rien de particulier, mais la botanique, ça n’a jamais été mon fort. En plus, je trouve qu’elle gêne sur la table. Je la soulève avec difficulté – elle pèse une tonne cinq au moins ! – et la pose dans un coin de la salle. Puis je découvre les toilettes. Il y a un petit cadre représentant une Sainte. Etrange idée que de l’accrocher là, non ? Mais bon, je ne veux pas juger. A l’étage, quatre chambres et deux salles de bain. Je prends tout mon temps pour choisir la plus belle pièce, les premiers arrivés sont les premiers servit, et toc ! Je m’installe tranquillement dans une belle pièce lumineuse avec de jolis rideaux écrus. Le lit grince un peu mais de toute façon, tous les lits où j’ai dormi, à la campagne, grinçaient. Je vide ma valise, je retouche mon gloss., je revérifie pour la cinquième fois l’absence de message sur mon répondeur… Il doit au moins être 14h là.

    Je vérifie avec espoir à mon poignet. 12h15. Et là, tout à coup, je ressens comme une vague de panique. A la campagne, le temps s’arrête. Je vérifie ce phénomène depuis que je suis toute petite. A chaque fois c’est pareil. Il suffit que je m’éloigne un peu des relais téléphone, qu’il y ait autour de moi trois champs ou plus et que je sois à moins  de deux cent mètre d’une vrai vache et là ça ne loupe jamais. Le temps s’arrête, l’air semble immobile et j’entends mon propre souffle. Je suis comme perdu dans le vide galactique. L’angoisse totale. J’ai du mal à respirer. J’ai besoin du contact de la civilisation. Rapidement ! Tout de suite !


    Chapitre 2

    C’est ainsi, avec la ferme attention de pactiser avec les peuplades de ces terres reculées, que je quitte la maison. J’adore les gâteaux secs, mais de la à ne manger que ça pendant trois jours, il y a tout un monde.
    Je sors dans la rue et me dirige lentement vers la place centrale. L’ambiance est menaçante. Il fait très chaud. Tout est silencieux. Le village semble désert. On se croirait dans un mauvais Western, surtout quand je vois une poule traverser la rue en picotant. Je pourrai croiser John Wayne que ça ne m’étonnerai qu’à moitié. J’essaye de me concentrer sur mon objectif : trouver de quoi remplir mon frigo. Je me laisse guider par l’odeur alléchante d’un poulet rôti. Cette solution est mille fois plus simple que de courir moi-même après une volaille qui refuse de ce laisser attraper.

    C’est ainsi que j'ai atterrie dans cette petite boucherie local. Tant mieux pour moi, cette boutique semble être le point de ralliement du village, là où tout se passe, là où ça bouge ! C'est-à-dire qu’au moment où j’arrive, il y a trois vieilles dames et le boucher qui discutent avec animation. Autant dire qu’il y a foule !
     La première des vieille est assise sur une chaise, son caddie rose fluo coller à elle. La seconde tiens dans ses bras un genre de caniche affreux blanc sale qui aboie aigu. Je déteste les chiens et encore plus les caniches qui aboient aigu. La troisième, superbe dans sa jolie blouse fleurie, très estivale, bouge avec conviction les bras dans tous les sens pour appuyer ses propos. Mais au moment où j’entre, j’assiste à un magnifique arrêt sur image grandeur nature. C’est impressionnant. En une fraction de seconde, les trois arrêtent leurs bavardages, se tournent vers moi et me passent au scanner intégral. C’est encore pire que lors d’un entretient d’embauche ! Faut dire que je ne dois pas avoir le look couleurs locales avec mes sandales compensées, mon sac à main top tendance et ma manucure nickel. Heureusement qu’elles ne savent pas que j’ai mon pass navigo dans une poche et un téléphone portable dernière génération dans l’autre. Puis, brusquement, comme si je n’avais jamais fais irruption dans leur monde, elles repartent de plus belles dans la critique gastronomique du dernier déjeuner de famille donner par la voisine, Madame Jeannine semble-t-il. Résignée à mourir d’ennuie debout en attendant mon tour, je passe en revue la boutique du regard. Elle a tous les détails du commerce de proximité villageois. A gauche de la porte, un grand bac remplie de paquets de chips en tout genre. Personnellement, je déteste ceux avec les goûts chimiques et bizarres genre « barbecue » ou « bolognaise » et pire encore : « oignon ». J’ai toujours eu un problème avec les produits « goût oignon ». Une fois, lors d’un voyage scolaire en Angleterre, alors que j’avais vraiment faim, une fille m’a proposer un muffins que sa famille d’accueil lui avait donné. A l’oignon. Sauf que je ne le savais pas. Et les muffins aux oignons, ce n’est pas bon du tout. Une autre fois, sur un marché de Noël de dégustation, j’avais pris une grande cuillère de confiture à la poire pour goûter. Et surprise ! Je n’avais pas pioché dans le bon pot et j’ai avalé une grande bouché de confiture à l’oignon. Et la confiture à l’oignon, quand on attend de la poire, ce n’est pas bon du tout non plus… Mais je m’égare là. Je pioche rapidement un paquet nature et je continue mon observation. Sur le même mur, il y avait des étagères avec des paquets de pâtes et des conserves en tout genre. Boucherie-épicerie, le grand luxe quoi... Le côté droit était occupé par la vitrine. J’ai toujours trouvé ça un peu écoeurant : les salades composés qui ne ressembles à rien, les pâtés en croûte, toutes ces… choses qui flottent dans de la gélatine brunâtre, et ces tranches de viandes sanguinolentes. Le pire dans tout ça, se sont les cervelles et les langues. Brrr… rien que d’y penser ça me donne la chair de poule. Je relève donc assez rapidement les yeux. Comme dans presque toutes les boucheries du pays, il y a un poster au mur avec un cochon rose en costume bleu et un chapeau à rayure, qui rigole. Je ne comprend pas. Pourquoi ont-ils tous cet affreux poster ? C’est un cadeau offert pour « toute boucherie ouverte » ? Et bien sûr, sur le comptoir, il y un autre petit cochon, en céramique celui là et avec une fente sur le dos. Il y a-t-il vraiment des gens qui donne un pourboire à leur boucher ?? Je trouve l’idée étrange, après tout on n’en donne pas dans les grands magasins, ou quand on achète un tee-shirt…
     L’attente s’éternise, c’est-à-dire que j’attends bientôt depuis plus de cinq minutes, ce qui est intenable pour quelqu’un qui comme moi, viens d’une ville où quand on marche au lieu de courir c’est qu’on est perdu ou touriste. Je tente alors de m’intéresser discrètement à la conversation.
      « Parait que le p’tit de la Jeanne, c’est le portrait craché de son père… c’est pas facile de commencer dans la vie avec un tel handicap…
      - C’est surtout triste pour la mère ! Si au moins il avait eu ses yeux, mais non ! En plus il parait qu’il suit les traces non recommandables de son frère…
      - C’est comme Luc, le fils de Madame Bourdin, hier il a été pris dans le jardin du vieux Maurice, en train de voler des framboises ! Il parait que… »
    L’anecdote est amusante mais je me lasse rapidement. Le boucher le remarque, ainsi que mon exaspération grandissante. Ok, c’est parce que je pianote des doigts sur le bord de la vitrine en soufflant un peu et en regardant en l’air depuis cinq minutes. Mais bon, je n’allais quand même pas rester ici, à attendre que les trois vieilles passent en revue toute la population du village, leurs descendances et les voisins des petits enfants ! Même si c’est drôle à écouter quelques instants.
     «  Alors mademoiselle, qu’est ce qu’il vous faut ?
    Heureuse que ça soit enfin mon tour, je réponds en souriant.
      - Un poulet rôti s’il vous plait.
      - Avec ou sans patates ?
      -  Sans, merci.
      - Je suis désolé, elles ne veulent pas partir…dit-il en agitant le sachet en papier.
      - Pardon ??
      - Les patates, elles ne veulent pas partir du sachet… »
    Avec un grand sourire, il secoue de nouveau le sac sur lequel est représenté une petite poule brune entourée de pommes de terre de jaunes, sur un fond de campagne. Je comprends la blague, il parle du dessin. C’est misérable. Mais au moins, maintenant je sais pourquoi il y a foule dans sa boutique : c’est LE rigolo du village, celui qui y met de l’animation, qui le fait vivre ! Je tente un pauvre sourire mais je ne pense pas que soit très convainquant. La blague n’est vraiment pas assez drôle. Je dois vraiment faire une tête bizarre, parce qu’il rajoute :
      «  N’attristez pas votre front gracieux, ce n’est qu’une blague, continuez à sourire, c’est si joli.  Et il me fait un petit clin d’œil en emballant mon futur dîner. Là, je suis étonnée. Je dois faire erreur, ce n’est pas possible. Non, sérieusement ?
      - Désolée, je dois rêver debout, mais merci, c’est gentil à vous…
      - Riez pourtant !
      - Du sort ignorez la puissance… »
    C’est à son tour de faire un grand sourire. Je ne rêvais donc pas. Il est en train de me citer A une jeune fille de Victor Hugo. Je décide de le tester encore un peu, on ne sait jamais. Je lance au hasard :
    «  Maintenant que Paris, ses pavés et ses marbres …
      - Et sa brume et ses toits sont bien loin de mes yeux ;
      Maintenant que je suis sous les branches des arbres…
      Et que je puis songer à la beauté des cieux … »
     A Villequier. Comme ça, sans hésiter, il complète les vers d’un poème inconnu pour la plupart des littéraires que je fréquente habituellement. J’en reste bouche bée. Il a fallu que ça tombe sur un boucher perdu au fin fond de la campagne. J’ai tellement du mal à y croire que je tente un dernier vers.
     «  Le rêve et la brume…
      -Vont où va la nuit ;
      Paupières et roses
      S'ouvrent demi-closes ;
      Du réveil des choses
      On entend le bruit. »
      L’aurore s’allume. Sans faute, sans oublier un mot, il récite la fin de la strophe. Cet instant est magique. Pour la première fois de ma vie, je rencontre un homme qui :
    1)    sache du Victor Hugo par cœur.
    2)    Ait moins de cinquante ans et ne sois pas à moitié chauve.
    3)    Ait un plan B dans la vie autre que chanteur, poète ou clochard-bôhème.

     Lui aussi à l’air content. Les trois vieilles, elles, sont muettes. On dirait trois statuts mais je suis certaine qu’elles ne perdent pas un mot de la conversation. Je soit sûrement être en train de leur donner matière à causer pour les vingt prochains hivers. Il me tend le poulet et les chips. Je paye et je m’apprête à quitter la boutique quand il me demande timidement :
      - Mademoiselle, si je peux me permettre, si cela vous intéresse, il y a le serto à Nantua, demain matin, vous devriez venir…
      - Le quoi ?
     Devant mon ignorance, la vieille au caddie se met à pouffer. Je la calme immédiatement avec le regard-qui-tue-numéro-17.
      - Le C-R-T-O. répète-t-il avec amabilité. Le Concours Régional de la Terrine d’Or.  En disant ça il rougit jusqu’à la racine des cheveux.
      - Et bien, euh… pourquoi pas…
    Pourquoi pas ? J’ai déjà une très bonne raison qui me vient instantanément à l’esprit : parce que je ne veux pas aller à une assemblée de rustres qui se réunissent pour manger du pâté en parlant cochon et volaille.
      - Je ne sais pas, peut-être…
      - Ça me ferai plaisir…
    Il est tellemtent cramoisi que ça en devient touchant.
      -  Je verrai… Au revoir Monsieur. »

    Chapitre 3

     De retour à la maison, je repense à la scène. Victor Hugo par cœur quand même ! Où alors il n’en connaît que trois et il a eu beaucoup de chance. Mais les probabilités sont minces. En plus il était plutôt mignon dans son genre… mis à part le gros tatouage en forme de scorpion sur son bras droit et le petit en forme de triskèle celtique sur le poignet gauche. Je n’aime pas trop les tatouages, pour moi ça fait homme-qui-veut-faire-viril ou femme-qui-veut-faire-sexy alors qu’en fait, ça fait juste dessin-horrible-surtout-quand-on-vieilli. Mais bon, chacun ses lubies. Moi ça fait des années que je collectionne les dauphins en porcelaine pour les détruire, et personne ne comprend pourquoi…

    J’étais en train de m’installer une chaise longue dans le petit jardinet derrière la maison, toute entière à mon analyse quand soudain la peur de ma vie ! Je me retrouve presque nez à nez avec une gigantesque vache ! Elle, pas un battement de cil, pas un poil qui bouge, elle me regardait tranquillement en mâchouillant un touffe d’herbe. Et en bavant un peu. Pour moi, les animaux, c’est encore pire que la campagne. Que ça soit un escargot mignon, un chien gentil, un bébé phoque trop chou ou une Montbéliarde énorme qui s’appelle Marguerite – ça je le sais parce que c’est écrit sur l’étiquette orange de son oreille – je flippe.
    Je vais vous expliquer. Pour la plupart des humains il y a différentes catégories d’animaux: les insectes, les mammifères, les poissons, les reptiles, les oiseaux… bref tout est bien ordonné selon des tas de critères précis. Chez moi c’est beaucoup plus simple : il y a les animaux dangereux d’une part et les animaux très dangereux d’autre part. Ou alors quand je fais un effort, il peut y avoir : les animaux à éviter, les animmaux à éviter à tout prix, les animaux flippants et les animaux répugnants. Pourtant il faut faire attention. Même si je déteste toutes les bêtes, cela ne m’empêche pas d’être révoltée quand on les maltraite, d’être farouchement opposé au port de la fourrure et des bijoux en ivoire et de haïr les méchants qui font des marées noires qui tuent les oiseaux et les poissons. J’aime les animaux, mais de loin.
    Donc je me retrouve nez à nez avec Marguerite. La situation est totalement ridicule. Elle porte un nom de jolie petite fleur des prés alors qu’elle fait au moins un mètre cinquante au garrot pour huit cent kilo de viande ! Elle s’est sûrement échapper du champ voisin pour venir brouter dans mon carré d’herbe. Et ce n’est pas moi, avec mes cinquante-cinq kilo tout mouillé, mon livre et ma chaise longue, qui vais la déplacer. Surtout que tout mon être refuse catégoriquement de s’approcher. Brusquement, toujours sans bouger, elle me lance un long meuuuuuuuuuh. Je fais un bond de cinq mètres en arrière tellement je sursaute fort. Je suis sûre qu’en plus, elle se moque de moi, on dirait vraiment la Vache qui Rit quand elle me regarde.
    Puis, toujours tranquillement elle se met à avancer vers moi. Panique ! Elle se rapproche ! Alerte rouge ! Je me fais attaquer par un monstre à cornes ! Elle a une langue gigantesque qu’elle utilise pour nettoyer son  nez qui coule ! Beurk ! Au secours !
    N’écoutant que mon instinct de survie, je fais une prudente retraite dans la maison en priant très fort tous les dieux, même ceux de la mythologie grecque, de me sortir de ce mauvais pas. Je pense qu’ils m’ont entendu vu que la vache, après avoir distraitement fait un tour sur la terrasse en ciment, fait demi-tour. Je la suis du regard. Il y a dans le fond du jardin un trou dans la clôture, qui donne directement sur un troupeau. Je vais devoir vivre face à dix génisses plus grosse que ma voiture pendant deux semaines. C’est sûr, je vais mourir. Le milieu est bien trop hostile. En plus, il y a maintenant une énorme bousse à moins d’un mètre de ma chaise longue…

     J’appelle donc immédiatement le propriétaire de la maison - cool, je capte bien dans le jardin ! - pour lui expliquer mon problème d’invasion. Il a le culot de se marrer ! Il ne dois pas comprendre la détresse qui est mienne en cet instant. Savoir qu’a chaque instant mon espace vital peut être envahi par un représentant vivant de l’espèce animal est une angoisse que je ne peux pas supporter.  Au lieu de compatir, il me dit que ce trou existe depuis des années, que ce n’est pas grave, qu’en général les vaches ont la trouille et qu’elles ne devraient plus revenir maintenant qu’elles ont vu que la maison était de nouveau occupée. Mais ma voix commence à monter dangereusement dans les aigus. Je dois avoir l’air hystérique puisque au bout d’un moment il fini par accepter de venir régler mon problème de cohabitation. Je le remercie chaleureusement quand il me dit :
     «  Bon et bien au revoir, je passerai demain.
     - Très bien, merci beaucoup. A demain. » Et nous raccrochons.
    Je ferme mon portable quand soudain je tilte. Demain ? Mais comment je vais passer l’après midi moi ? Je ne peux pas m’installer alors que le trou est là, béant ! Mais de là à le rappeler alors que je viens de me ridiculiser pendant dix minutes en le suppliant de faire quelque chose, c’est trop. J’ espère très fort ne pas avoir le droit au Retour de la Vache II. Cette fois le salon me parait beaucoup plus accueillant, même si je regrette de devoir rester enfermer alors qu’il y a un super soleil dehors. De toute façon j’ai oublier mon tube de crème solaire indice 90.

    Je tourne un peu en rond dans la maison. Je devrais profiter de cette solitude pour lire les romans que je dois lire pour la rentrée. Surtout qu’ensuite je râle parce que je n’ai pas une minute de libre pour le faire. Mais j’ai avec moi deux perles de la littérature : Faust I et II       de Goethe et Journal d’un voyage de Montaigne.  La deuxième partie du premier est si compliqué que même les grands critiques spécialisés n’arrivent pas à le commenter et le second est d’un ennuie total. Pendant près de 300 pages, l’auteur raconte le nombre de verres d’eau qu’il à bu dans chaque ville où il s’est arrêté lors de son voyage, le nombre de fois où il a été aux selles et le nombres de bains qu’il à pris en détaillant le temps qu’il a passé dans chacun d’eux. A mourir. C’est à vous déprimer de la littérature. Pour compenser j’ai aussi amener L’accro au shopping dit oui de Sophie Kinsella, mais celui là je le connais presque par cœur. Je sais, ma sélection n’est pas top, mais je ne m’attendais pas à finir toute seule je vous le rappelle !

     Je remonte dans les chambres et j’ouvre tout les placards. On ne sait jamais, je vais peut être découvrir un passage secret avec un long couloir souterrain. Puis au bout d’une heure de marche dans une ambiance lugubre mais où je garderai tout mon courage, je déboucherai dans une magnifique salle de bal où m’attendra un prince charmant endormi sur un grand fauteuil royal. Je le réveillerai d’un baiser. Au moment même où il ouvrira les yeux, il tombera follement amoureux de moi. On dansera au son d’une musique divine joué par des elfes blancs. Je porterai tout d’un coup la plus belle robe de chez Dior. Puis il m’emmènera visiter son beau palais climatisé. Et il m’offrira une immense bibliothèque avec la collection complète des Pockets. Et des Folios. Et des Livres de Poche. Ensuite, j’aurai le droit à un dîner romantique cuisiné par George Blanc en personne. J’en étais là de ma rêverie quand tout d’un coup, je découvre une grande planche en bois dans le fond d’une armoire. Je n’ai aucune idée de la raison pour laquelle on la rangé ici mais elle est idéale pour, par exemple, boucher les trous dans les clôtures. Toute contente je redescends, non sans me planter au passage une écharde dans l’index…

     Je pose la planche dans le fond du jardin puis je pars à la recherche d’outils. Bizarrement, mon premier réflexe est de chercher dans le tiroir à couvert de la cuisine. Et oui, chez mes parents, il y a toujours un tournevis multi pointe rangé là. Une idée à ma mère. D’un autre côté, partie comme je suis, j’aurais plutôt besoin de clous et d’un marteau pour accrocher la planche entre les deux poteaux en bois. Je ne trouve rien non plus sous le canapé, endroit où moi je range habituellement les outils. Je fini enfin par trouver mon bonheur dans le garage. Le premier problème, c’est qu’il y a tout un atelier en fait. Du coup j’ai le choix entre cinq marteaux différents et dix sortes de clous. Le second problème, c’est que je ne suis absolument pas douée en bricolage et je n’ai aucune idée de ce dont je vais avoir besoin. J’attrape donc au hasard les premiers qui me tombe sous la main. Je devrais m’en sortir...

    Pleine de bonne volonté, je m’atèle à la tâche. Je commence par vérifier soigneusement l’absence totale de vaches, d’insectes ou d’oiseaux dans mon périmètre de travail. Je soulève maladroitement la planche qui, par miracle, fait la taille exacte du trou ! C’est super, en deux minutes cette histoire sera réglée !
    Mais je décide de retourner dans la maison enlever l’écharde de mon doigt, parce qu’elle me fait mal. Une fois dans la salle de bain, je fais tomber ma pince à épiler. Comme elle est tombé entre le lavabo et la baignoire, je mets cinq bonnes minutes, en me contorsionnant de façon ridicule, à la récupérer. Et comme il a fallu que je vide entièrement ma trousse de toilette sur le sol de la salle de bain pour la localiser, je passe à deux doigts d’une gamelle spectaculaire en glissant sur le tube de dentifrice. Je me rattrape de justesse à la porte de la douche et je fini par réussir l’opération délicate d’extraction sans pleurer. Presque. Mais comme j’ai encore un peu mal et qu’une petite goutte de sang perle, je me mets un jolie pansement bleu. Avec ça, ça va tout de suite mieux, non ?

    Je retourne dans le jardin. Je revérifie l’absence total d’animaux. Tout à l’air tranquille. Je soulève la planche, tout en essayant de tenir un marteau et un clou. Ce n’est pas facile mais je fini, au prix d’énormes efforts des bras, à planter un clou. Fière de moi, je lâche la planche. Qui est bien sûr, trop lourde pour tenir avec un seul clou. Tout mon ouvrage tombe misérablement par terre. Je crois que c’est à cette minute précise de ma vie que j’ai le plus regretter l’absence de ma maman. Le bricolage, elle maîtrise. Elle sait faire, elle aime faire et moi, je me contente de lui apporter de temps en temps une tasse de thé. Voilà ma façon de bricoler : je demande aux autres de faire, et je m’occupe du ravitaillement en boissons. On appelle ça « échange de bon procédé ».
    Hélas pour moi, aujourd’hui, je n’ai pas le choix. Mais j’ai déjà les bras en compote ! Une petite pause s’impose. Il fait si chaud !

    A l’intérieur, l’air est à peine plus frais. Et, comme je n’ai pas encore fait de courses,  la bouteille de limonade fraîche qui me fait fantasmer en cet instant est absente de mon frigo. Evidemment… Je me contente donc d’un grand verre d’eau tiède.
    Retour devant la planche. Je la déteste de tout mon coeur mais je ne renonce pas. Je veux pouvoir profiter de la chaise longue ! Au final je passe six longues heures à travailler. Je suis même obligé de consolider les deux poteaux qui au passage, accroche mon tee-shirt au barbelé et le déchire un peu. Je suis obligé de trouver une pelle pour mettre de la terre autour des pieds, afin de consolider ma construction. J’arrive, à grand renfort de clous et de scotch à faire tenir ma planche. Je suis si contente de moi ! Bon, je dois avouer qu’objectivement, le résultat n’est pas très esthétique. Ma planche était en fait un peu trop courte, du coup les deux poteaux sont penchés. Et le scotch pendouille un peu. Mais l’ensemble tiens. A moi la bronzette !
     Je regarde l’heure. Il est près de vingt heures. Le soleil est déjà en train de se coucher. Brusquement, ça me donne envie de pleurer. J’ai des ampoules dans les mains. Mon travail est affreux. Je n’en profiterai pas aujourd’hui. J’ai soif. Une araignée est venue me rendre visite, j’ai en très peur. J’ai abîmé un vêtement que j’aime beaucoup. J’ai de la terre sur mon short en jean bleu clair.
     
    Chapitre 4

     Déprimée par cette mauvaise journée, je décide de prendre un long bain relaxant. Une fois dans la salle de bain, je commence à enlever mes vêtements. Et là, une douleur intense me traverse au moment où le tissus frotte le long de ma nuque. Je me regarde dans la glace. J’ai pris un énorme coup de soleil ! Mon visage, mon cou, mes avant-bras et même mes mains sont écarlates. J’étais si absorbé par mon entreprise que je n’ai pas fait attention. Comme j’ai la peau  très blanche, je passe l’été à me tartiner d’indice 90 mais là je l’ai totalement oublié. Maintenant ça me brûle. Très délicatement je prends une douche à peine tiède. Ça pique, c’est douloureux. Puis la séance de séchage est une autre torture.
    Et au moment où je veux m’étaler une couche bienfaitrice de biafine, je sens tout le poids de la solitude. Comme je n’arrive pas à l’étaler correctement sur mon dos, j’en ai dans les cheveux et sur mon débardeur propre. En plus, contre coup d’une journée au soleil sans chapeau, je commence à avoir froid et mal à la tête. Quand je reverrai mes amis, je les étranglerai un peu pour m’avoir abandonné là, puis je  les attacherai en plein soleil, tout nus barbouillé de confiture, comme dans la chanson de Perret.

     Le soir je savoure mon poulet rôti devant la télé. Le choix est limité, il y a la un, la deux, la trois, la cinq et la six. Ça change de mes trente-quatre chaînes à Paris, mais au moins le choix est vite fait. Je compense par le plaisir de manger avec les doigts comme une gamine.
    Enfin la soirée passe tout de même lentement.


    La nuit s’annonce longue. Pas une voiture, pas un métro, pas un avion qui ne passe pour me bercer de son vacarme familier. Puis brusquement je sursaute violemment : la cloche de l’église sonne les onze coups. Ma maison se trouvant juste derrière, je dois être celle du village qui en profite le mieux. Je finis par m’endormir d’un sommeil agité. Je passe la nuit à rêver de vaches menaçantes qui m’en veulent d’avoir fermer le trou dans la clôtures. Du coup elles me poursuivent à travers les champs où personne ne m’entend quand j’appelle au secours.

    Le lendemain, je suis réveillé à cinq heures du matin. Parce que les rideaux écrus, c’est sûrement très jolis, mais ça n’empêche absolument pas la lumière d’entrer dans la pièce. Il fait donc totalement jour dans ma chambre. En plus,tous les oiseaux du coin semblent s’être donné rendez-vous sous ma fenêtre pour me faire un concert privé. Vous croyez que je peux en assommer quelques uns, de mon lit, en lançant un ou deux coussins par la fenêtre ? La journée commence comme un matin… à la campagne. A part le chant des oiseaux un peu crispant et un chien, très loin, qui aboie, pas un bruit. Toujours aucun coup de klaxon, aucun camion poubelle bruyant, bref aucun signe sonore familier de vie ! La cloche de l’église résonne. Maintenant, c’est sûr, je ne pourrais plus me rendormir, autant me lever.
      Comme je n’ai toujours pas fait de courses dans un magasin digne de ce nom, je n’ai pas de café, pas de pain, pas de jus d’orange. Et à cinq heures du matin, je peux toujours attendre pour avoir mon croissant, d’ici que la boulangerie ouvre, je serai morte de faim. En fouillant dans les placard de la cuisine, je découvre le saint graal : un pot de confiture ! J’avoue, nature, c’est pas top, mais mon choix se réduit à confiture nature ou  reste de poulet rôti froid ou encore poulet rôti froid à la confiture. L’idée est un peu écœurante, c’est vrai.
      Pour oublier ma faim je décide de m’habiller et de faire un tour dans le village en attendant que les boutiques ouvrent. Une fois devant le miroir, je fais une découverte qui inscrit définitivement cette journée dans les annales des « jours les plus pourris de la galaxie ». Je suis victime des effets secondaires et violents du coup de soleil. Brûlure au vingt-cinquième degré sur le nez égal pelage assurer. Mon appendice nasal ne ressemble plus à rien, si ce n’est à un genre de choucroute bizarre, rouge et affreuse. La biafine apaise un peu la rougeur mais bon, c’est pas aujourd’hui que je défilerai pour l’Oréal…
      La journée étant définitivement ruinée, je sors un peu, histoire de profiter au moins de la fraîcheur matinale.

    Chapitre 6

    Sur la place de village j’aperçois le boucher en train de charger sa camionnette blanche. Quand il me voit, il me fait signe de la main. Je me rappelle les vers qu’il m’avait cité la veille. C’est quand même intrigant. Et comme j’ai continué mon chemin sans ralentir, je suis maintenant obligé d’aller lui parler, à moins de faire un brusque demi-tour, ce qui serait totalement impoli. A mon approche, il me sourit gentiment.
      « Vous êtes bien matinale. Je croyais que les vacances étaient faîtes pour se reposer.
    - J’ai bien essayé de dormir mais les oiseaux était d’un autre avis. »
    Je lui explique ensuite mon problème de rideaux quand je m’aperçois qu’il ne peut s’empêcher de fixer mon nez. Vu le carnage que c’est, je ne lui en veut même pas et j’enchaîne sur mon problème de vaches envahissantes. Il rigole un peu mais rajoute que si ça peut me rendre service, il pourra m’apporter une barrière. C’est chou…
     Le voyant jeter un coup d’œil à sa montre, je décide de continuer ma balade.
      «  J’ai été contente de vous revoir et de discuter un peu. (Mais pourquoi je dis ça ?) Mais je ne vais pas vous retenir plus longtemps. (voilà, remettons les choses en place tout de suite).
      - Oh mais non ! Vous ne me déranger absolument pas… Mais je suis en train de charger la camionnette pour partir au CERTO…vous savez le concours… »
    J’opine de la tête sans vraiment écouter ce qu’il bafouille. Je viens d’apercevoir dans des bocaux de choses multicolores flottants dans un liquide qui ressemble à de la gélatine. On dirait des bouts de cahoutchou multicolore dans du formol, comme dans un mauvais film de science-fiction. Si ça se trouve, en vérité, ce n’est pas un simple boucher de campagne mais un savant fou qui fait des expériences bizarres et illégales. Il fait des mélange étranges et il est sur le point de découvrir LA formule qui révolutionnera le monde, celle qui permettra de créer un vernis à ongle qui sèche en moins de sept seconde, qui tient trois semaines et qui pousse avec les ongles !
    -    Alors, vous êtes d’accord ?
    Je raterris brusquement sur terre. Je n’ai strictement aucune idée de ce qu’il vient de m’expliquer ni en quoi consiste sa demande. Vu l’air mi-souriant mi-suppliant qu’il fait, j’hésite un inst    ant avant de répondre.
     -Euh…et bien… oui... »
    Son sourire d’élargit et il ouvre la portière. Zut. Je ne sais pas ce que je viens d’accepter, mais je crois qu’il faut maintenant que je monte dans la camionnette. Je me rappelle son invitation de la veille et qu’il vient de réitérer sa demande, que je suis d’accord et que je vais faire le trajet avec lui. Je suis tellement en train de me sermonner moralement sur le fait qu’il faille écouter les gens quand ils vous parlent, que je ne trouve pas de moyen de refuser après avoir dit oui. Aucune excuse ne fonctionne, vu que je lui ai raconté que je n’avais rien à faire… A contre-cœur pour le moment, je m’installe.
     Sur la route, on commence à discuter. Il m’explique le principe du concours, le fait que son père et son grand-père déjà y participaient déjà avant lui et tout les efforts qu’il a fait cette année pour créer une terrine de veau aux myrtilles, sauce (boisson du coin).








     

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    En France, avec le vieillissement de la population, le nombre de personnes âgées ayant besoin d'une aide pour effectuer les gestes essentiels de la vie quotidienne est de plus en plus important, on comptait selon l'INSEE, en 1970, 9 109 664 de personnes ayant plus de 60 ans alors qu'en 2007 il y en a environ 15 millions. Ces personnes âgées sont à un moment de leur vie victimes de dépendance. Elles entrent ainsi en institution dont les causes sont surtout liées à un degré de dépendance ou à la solitude. Ces institutions peuvent être soient des maisons de retraite, des foyers d'hébergement, des résidences services ou encore des établissements d'hébergement de personnes âgées dépendantes (EHPAD).<o:p></o:p>

           Au plan psychosociologique, le vieillissement s’accompagne de l’émergence de sentiments multiples, comme par exemple l’inutilité, la sensation d’être une charge pour les autres, la solitude et l’abandon, la sensation de posséder un corps devenant incontrôlable. Trois aspects se dégagent : la personne âgée tend vers une maîtrise passive de l’environnement, une réduction de son activité et une préoccupation grandissante de son monde intérieur. On observe classiquement un désinvestissement de la réalité extérieure et un hyper investissement de soi. On remarque une diminution importante du réseau social. Des pertes relatives à la capacité de déplacement et à celle d’interaction avec l’environnement (vision et audition) sont subies par la personne âgée et l’amènent à limiter ses contacts avec l’extérieur et à se refermer sur elle-même. Le déménagement en institution accentue cette diminution du réseau social et d'isolement.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    <o:p> </o:p>

           J'ai effectué mon stage du 12 au 24 mars, puis du 1er au 6 juin, et enfin du 8 au 20 octobre 2007 à la résidence médicalisée Maison Molière, se trouvant à Bourg - la - Reine (92).<o:p></o:p>

           <o:p></o:p>

           Mes motivations étaient de travailler dans une maison de retraite afin d'avoir un contact direct avec les personnes âgées, étant un public que je ne connaissais guère. Mon but est de mieux connaitre ce milieu avec les demandes de ces personnes et leurs problèmes puis établir par la suite, un projet afin d'aider les résidants à s'intégrer davantage socialement.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

           Le thème de mon étude sera l'animation, très importante dans les maisons de retraites pour les personnes âgées afin de les réunir et de les faire communiquer entre eux ainsi que d'essayer de préserver leurs capacités intellectuelles par l’intervention de l’association « En faim de contes », qui récitent des contes et des chansons. Cela aide également les maisons de retraite à ne pas être des "mouroirs".<o:p></o:p>

                                                                                                         <o:p></o:p>

           Pour cela diverses fonctions sont d'une technicienne ESF, puisque cette étude englobe tout d'abord des compétences pour découvrir et analyser les besoins des résidants par la méthodologie, puis de l'économie et de la gestion pour construire un projet réalisable ainsi que de la psychologie afin de mieux comprendre le public de cet établissement et également des compétences pour l'aménagement d'un lieu.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

           La problématique que dégagée au cours des 5 semaines où j'ai pu observer cette structure était liée à l'animation quotidienne des résidants, étant des personnes âgées quittant rarement la résidence. Pour cela, j'ai élaboré un questionnaire adressé aux résidants afin de savoir ce qu’ils pensaient de l'animation de la résidence, et s'ils avaient un besoin plus important et également un guide d’entretien à l’animateur afin qu’il puisse exprimer un avis professionnel sur l’animation des résidants et également un guide d'entretien avec le directeur afin de savoir s'il ressent un problème d'animation pour les résidants.  <o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

           Mon objectif était d'explorer cette structure et de trouver un cas d'étude montrant bien la principale problématique, à savoir un manque d'animation chez les résidants, et plus particulièrement d’animation mentales, afin de pouvoir éventuellement les aider.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

           Nous allons donc étudier, dans un premier temps l'étude, avec la méthodologie afin de mieux définir les outils convenant pour recenser le besoin du public. Vient ensuite la présentation de l'institution contenant son descriptif et son public concerné puis en deuxième partie les solutions envisagées pour résoudre ce besoin<o:p></o:p>

    Dans un second temps nous verrons le projet avec tout d'abord son identification puis sa mise en place, les différents moyens puis enfin l'évaluation portée à ce projet.<o:p></o:p>

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    1.1 METHODOLOGIE<o:p></o:p>

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    <o:p> </o:p>

    Dans le cadre de mon stage "étude et projet", j'ai réalisé des outils afin de découvrir certaines informations permettant de prouver un besoin dans la structure. J'ai donc réalisé un questionnaire sur l'animation que j'ai soumis à 24 des 59 résidants, ainsi que deux guides d'entretien semi-directif à l'animateur et au directeur et un guide d'entretien directif à une bénévole de l'association "En faim de contes".<o:p></o:p>

                1-1-1) Observation des résidants<o:p></o:p>

          <o:p></o:p>

    Afin de repérer ce besoin, il y eut tout d'abord un temps d'observation des résidants pendant lequel j'ai pu constater qu'ils passent la plus grande partie de leur temps dans le salon avec les autre résidants. Ils y passent environ 5h30 chaque jour, avec la télévision, sauf que personne ne la regarde réellement, elle sert surtout à créer un bruit de fond. Les résidants restent donc à la même place pendant tout ce temps. <o:p></o:p>

           C'est également à cet endroit que vient l'animateur pour effectuer ses activités, le mardi et le jeudi pendant une heure. Mais mis à part lui, aucun autre animateur n'est présent le reste de la semaine. <o:p></o:p>

           <o:p></o:p>

    Objectifs visés<o:p></o:p>

    Auprès de qui<o:p></o:p>

    Outils<o:p></o:p>

    Mode de passation<o:p></o:p>

    Repérage du degré de satisfaction des résidants sur l’animation.<o:p></o:p>

    24 résidants<o:p></o:p>

    Questionnaire<o:p></o:p>

    Auto-administré<o:p></o:p>

    Obtenir des renseignements sur le public étudié pour mieux le comprendre.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    Bibliographie<o:p></o:p>

    Dossier des résidants<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    Connaître l’opinion de l’animateur sur l’animation de la résidence.<o:p></o:p>

    L’animateur<o:p></o:p>

    Guide d’entretien<o:p></o:p>

    Semi-directif<o:p></o:p>

    Connaître l’opinion du directeur sur l’animation de la résidence.<o:p></o:p>

    Le directeur<o:p></o:p>

    Guide d’entretien<o:p></o:p>

    Semi-directif<o:p></o:p>

    Connaître l’association « En faim de Contes»<o:p></o:p>

    Une bénévole<o:p></o:p>

    Guide d’entretien<o:p></o:p>

    Directif<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    1-1-2) Le Questionnaire<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

           Pour pouvoir compléter et prouver ce constat, l'élaboration d'un questionnaire fut nécessaire. Il permit de savoir réellement ce que chaque résidant pensait de l'animation de la résidence et de constater s'ils éprouvaient ou non un réel besoin d’activités supplémentaires.                    <o:p></o:p>

           La passation de cet outil a été effectuée lors de mon deuxième stage le 5 juin, dans un endroit privé, souvent la chambre de l'usager, afin qu'il reste confidentiel et surtout après avoir bien précisé que le résidant conserverait l’anonymat.<o:p></o:p>

           Les avantages de cet outil sont les réponses claires et précises aux questions fermées à entourer, plus faciles à appréhender pour le résidant que des questions ouvertes nécessitant une plus grande réflexion. Sa rapidité permet également d’interroger un grand panel de personnes en un temps limité. <o:p></o:p>

           Cependant, il a un inconvénient : l’élaboration est longue et rigoureuse, surtout lorsqu’il y a une absence de logiciel informatique, ce qui n'était pas mon cas.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

           1-1-3) La Bibliographie et les dossiers des résidants

    <o:p> </o:p>

           Cet outil permet de recueillir des informations spécifiques sur les personnes âgées en général, ainsi que des informations sur les résidants, permettant de mieux connaître les besoins de ce public, ainsi que d'effectuer une étude comparative entre les personnes âgées en général et les usagers, que l'on retrouve dans la présentation de la structure.<o:p></o:p>

             Les avantages de ces outils sont de connaître et d'approfondir les connaissances et droits de ce public notamment juridique, leur droit à l'animation et l'importance de celle-ci surtout dans les maisons de retraite, leurs aides financières et leurs états de dépendances. Ces connaissances vont être à la base des projets que l'on peut élaborer pour eux.<o:p></o:p>

           Les inconvénients de cette étude sont sa recherche longue, par l'étude des 59 dossiers des résidants ainsi que la lecture des livres sur ce public (cf. bibliographie). Les dossiers des résidants peuvent parfois se révéler incomplets ce qui entrave la recherche.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

             1-1-4) Le Guide d’entretien semi-directif

    <o:p> </o:p>

             Afin d'identifier le besoin que ressentent les résidants, un entretien semi-directif auprès de l'animateur et du directeur a été nécessaire, l'animateur  pour son avis professionnel sur l'animation des résidants et le directeur également pour ses propres constats de l'animation ainsi que ceux qui sont faits lors du Conseil de Vie sociale une fois par semestre. Cet outil a permis à ces deux professionnels de pouvoir donner librement leur opinion oralement en étant orientés par mes suggestions.<o:p></o:p>

           Ses avantages sont de pouvoir laisser s'exprimer l'animateur et le directeur, et ainsi traiter le sujet de l'animation plus en détails. Egalement au cours de ce dialogue, certaines questions oubliées, en rapport avec l'animation et les usagers peuvent être abordés.<o:p></o:p>

           Son  inconvénient majeur est la possibilité d'effectuer des hors sujets ce qui n'a pas eu lieu, et également d'utilisé un vocabulaire neutre pour ne pas les influencer.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

             1-1-5) Le Guide d'entretien directif

           J’ai souhaité réaliser un entretien avec la bénévole de l'association "En faim de contes" afin de collecter les informations concernant le fonctionnement de la structure.<o:p></o:p>

           Ses avantages sont que cet outil est simple, rapide, permettant de répondre à des questions concises et évitant ainsi tout risque de hors sujets.<o:p></o:p>

           Son inconvénient est son temps d'élaboration pouvant être long, ce qui n'a pas été mon cas.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

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    <o:p> </o:p>

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    <o:p> </o:p>

    <o:p> </o:p>

    1-2 PRESENTATION DE LA STRUCTURE<o:p></o:p>

    1-2-1) Institution

    1-2-1-1) Description

    La structure se nomme Maison Molière. C'est une résidence médicalisée pour personnes âgées, répartie en 2 établissements (23 et 26 Boulevard Carnot 94 240 Bourg-la-Reine).<o:p></o:p>

    La Maison Molière se situe à 2 minutes de la station "Bourg-la-Reine" de la ligne du RER B. Par le bus on peut y accéder par le 187 à l'arrêt "Barbusse Larroumès" et également par le 192 à l'arrêt "Galois". Par la route on peut s'y rendre en prenant la RN 20 direction Bourg-la-Reine.<o:p></o:p>

    L'annexe de la Maison Molière, situé au 23 boulevard Carnot fut ouvert le 1er janvier 1998 faute d'un manque de place afin de mieux répondre aux demandes de plus en plus nombreuses de personnes âgées qui, soit par elles mêmes, par leurs famille, ou par recommandation de leur médecin, souhaitent vivre dans cette maison de retraite.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    <o:p> </o:p>

           1-2-1-2) Organisation

           <o:p></o:p>

     - Statut<o:p></o:p>

    La Maison Molière est un établissement privé à but lucratif ; il s'agit d'une entreprise individuelle dont le but est la production de richesse.<o:p></o:p>

    Ce type d’établissement représente 85% des entreprises en France, soit 3,2 millions en 2006. Cette entreprise est la propriété d'une seule personne, ou dans le cas présent d'un couple qui est également à la tête de la direction. Ils sont même responsables des dettes de façon illimitée (leurs biens pouvant être saisis). Pour créer une entreprise individuelle, il suffit de s'inscrire au Registre du Commerce et des Sociétés ou au Registre des Métiers. Ce statut est celui des très petites entreprises, son personnel étant inférieur à cinquante personnes.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    - Organisation financière<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    ·                     Le financement de la résidence médicalisée se fait par les recettes réalisées par l’hébergement des résidants (100%)<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    La Maison Molière ne reçoit pas d'aide sociale du fait de son statut juridique, cependant depuis décembre 2007 elle bénéficie de la Convention tripartite, signée entre l’Etat, le Conseil général et l’établissement pour personnes âgées dites dépendantes, devenant ainsi une EHPAD.<o:p></o:p>

    Les différents postes de dépenses concernent les salaires du personnel (40%), les dépenses liées à l’hébergement des résidants tel que la cuisine, la blanchisserie… (25%) ainsi que l’entretien des locaux et les travaux de réaménagement (35%).<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    Les conditions financières vis à vis des résidants sont divisées en deux parties :<o:p></o:p>

    - Le tarif de l'hébergement est fixé par l'établissement mais est contrôlé par la Direction Départementale de la Concurrence et de la Consommation, dans le cadre de la réglementation en vigueur.<o:p></o:p>

    Chambre particulière         : 89,39€TTC ou 102,40€ par jour pour les chambres de 22 m².<o:p></o:p>

    Chambre double                : 75,45€TTC par jour.<o:p></o:p>

    Aux frais d’hébergement peuvent s’ajouter des suppléments comme le téléphone, le coiffeur, les repas pris par les visiteurs… Ils sont à la charge des résidants.<o:p></o:p>

    - Le tarif de dépendance fixé et contrôlé annuellement par un Arrêté Préfectoral.<o:p></o:p>

    Le prix varie en fonction de la dépendance de la personne qui se justifie par le GIR, évalué selon la grille nationale d’AGGIR (Autonomie Gérontologie Groupes Iso-Ressources).<o:p></o:p>

    Elle constitue un outil destiné à évaluer le degré de perte d’autonomie, ou de dépendance, physique et psychique, des demandeurs de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA), dans l’accomplissement de leurs actes quotidiens.<o:p></o:p>

    Pour une personne relativement autonome le prix sera de 4€32 TTC par jour (GIR 4 à 6).<o:p></o:p>

    Si elle a besoin d'être plus encadrée ce sera 10.28€ TTC (GIR 2 à 4).<o:p></o:p>

    Enfin si elle est complètement dépendante 16.33€ TTC (GIR 1 à 2).<o:p></o:p>

    Les résidants ne sont pas regroupés par GIR, leur chambre ne leur est attribuée que par la vacation de celle - ci.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    Ces deux tarifs représentent un prix de journée et comprennent :<o:p></o:p>

           - Le logement, chauffage, éclairage<o:p></o:p>

           - La nourriture, l'entretien des locaux (salles communes...)<o:p></o:p>

           - Le blanchissage<o:p></o:p>

           - La fourniture des couvertures, oreillers, couvre-lit<o:p></o:p>

           - Les protections pour incontinence (couches)<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    <o:p> </o:p>

           - Organisation matérielle<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    Les locaux aménagés sont élevés sur deux niveaux, construits sur deux sites distincts, aux 23 et 26 boulevard Carnot ayant chacun : <o:p></o:p>

    ·                     Une salle de restauration<o:p></o:p>

    ·                     Un salon<o:p></o:p>

    ·                     Une bibliothèque<o:p></o:p>

    ·                     Un accueil<o:p></o:p>

    ·                     Un lieu de vie à chaque étage, constitué d'un petit espace où se trouvent des chaises et une table où l'on peut lire...<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    Les terrains bâtis font respectivement 1100m2 et ont chacun un parking et un jardin à la disposition des résidants. Cependant aucune différenciation pour les usagers entre les deux bâtiments puisque les résidants ne sont pas répertoriés par leur état de dépendance (GIR).<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    Dans la Maison Molière se trouvent :<o:p></o:p>

    ·                     Les bureaux de l'administration<o:p></o:p>

    ·                     La cuisine centrale où l'on stocke les provisions.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    Néanmoins l'annexe de la Maison Molière possède aussi une cuisine.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    L'aménagement extérieur a peu de signalisation, à part sur la grille de l'extension de la résidence où l'on voit une grande pancarte où est inscrit le nom de la Maison Molière.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    - Moyens humains<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    Le personnel gérant le coté administratif de la structure : <o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    ·                     Un directeur, qui se charge de la gestion et du financement de la Maison Molière<o:p></o:p>

    ·                     Une assistante de direction, qui gère le budget de la résidence <o:p></o:p>

    ·                     Une responsable des relations publiques, qui reçoit tous les dossiers des futurs résidants<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    Le personnel s'occupant de la santé et de l'entretien des résidants sont les suivants : <o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    ·                     5 cuisinières s'emploient à cuisiner et servir les repas des résidants<o:p></o:p>

    ·                     Un homme d'entretien gère les outils techniques de la résidence<o:p></o:p>

    ·                     3 infirmières veillent à la santé des résidants<o:p></o:p>

    ·                     3 aides - soignantes aident les infirmières dans leurs tâches<o:p></o:p>

    ·                     Une blanchisseuse lave et repasse le linge de tous les résidants<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    Le personnel ne faisant pas partie de la structure, et qui vient plusieurs fois par semaine et même parfois tous les jours :<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    ·                     4 kinésithérapeutes aident les résidants à garder ou à retrouver leurs capacités physiques, ils ont leur propre cabinet et ne viennent que pour les patients qu'ils ont à charge<o:p></o:p>

    ·                     1 animateur anime les mardis et jeudis après-midis des résidants en leur faisant faire des exercices physiques ou mentaux durant une heure. Il est également à son compte.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

           1-2-1-3) Les Missions

    <o:p> </o:p>

    Ce que la résidence tend à satisfaire : Elle est pour les patients d'abord un lieu de vie mais également un espace d'échanges, car ce sont parfois des personnes seules et isolées qui réapprennent à vivre en communauté. La mission principale qu’elle effectue « assurer une vie alliant sécurité et confort pour des courts, moyens ou longs séjours » est spécifiée dans le dépliant d’accueil donné aux usagers.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    Ce qu'elle voudrait satisfaire : Son objectif est de rendre le séjour des patients le plus agréable possible, ce qui peut parfois être difficile à réaliser, puisque chaque personne a des besoins particuliers selon son état.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    Ce qu'elle ne satisfait pas : Elle ne peut pas toujours rendre agréables le séjour de certains résidants, qui sont relativement autonomes et qui "s'ennuient", alors que les personnes dépendantes n'expriment pas le même besoin. De ce fait, les résidants valides préfèrent s'isoler et ne vont que rarement dans les salles communes.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    1-2-2)  Public

           <o:p></o:p>

    En référence à l’âge de la personne, tout individu de soixante cinq ans ou plus est considéré comme personne âgée. Il est habituel de distinguer les personnes du troisième âge, c’est-à-dire de 60/65 ans à 75/80 ans et celles du quatrième âge de 75/80 ans et plus.<o:p></o:p>

    Cette définition, purement légale, ne tient pas compte du vieillissement différentiel (ou vieillissement biologique) de chaque individu, et ne fait aucune distinction entre personne valide et personne en perte d’autonomie. <o:p></o:p>

    En référence à un statut social, serait considérée comme personne âgée, toute personne non productive, à la retraite.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    <o:p> </o:p>

           1-2-2-1) Caractéristiques des usagers<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    Les usagers sont au nombre de 59. Leurs caractéristiques sont les suivantes :<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

    Age : La question du vieillissement de la population française et de son poids dans la société est de plus en plus récurrente. La population des plus de 60 ans correspond à 21,3% et les plus de 75 ans à 7,7% de la population totale. La proportion des 60 ans et plus dans la population totale est passée de 18% en 1970 à 21% en 1999. En France métropolitaine, plus de 16% de la population âgée ont plus de 65 ans.  A l'instar de l'espérance de vie qui augmente, l'entrée dans des établissements spécialisés comme les maisons de retraite recule également, en passant à 82,5 ans. A la Maison Molière, les résidants ont entre 60 et 98 ans, avec cependant une moyenne d'âge de 84 ans. Leur entrée dans cette maison est en moyenne, vers 82 ans.<o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>

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